Le Journal de Montreal

Il pleure sa fille battue à mort

Un père de famille d’Inukjuak fait les 100 pas dans l’espoir que la Sûreté du Québec arrête l’assassin

- FRÉDÉRIQUE GIGUÈRE MONTRÉAL

Lorsqu’un cadavre a été trouvé dans son village du Nord-duQuébec il y a deux semaines, Jobie Epoo refusait de penser qu’il pouvait s’agir de sa fille de 14 ans portée disparue. Son instinct d’ex-policier savait que tous les indices pointaient vers elle, mais son coeur de père ne pouvait le supporter.

Le 22 juillet en fin de journée, le corps ensanglant­é de Bethany Epoo a été découvert par des enfants à Inukjuak, une localité de 1700 habitants située au bord de la baie d’Hudson, à environ 1500 km de Montréal. Quelques heures plus tôt, la jeune fille aurait été violée, puis battue à mort. Son meurtrier court toujours.

« Quelqu’un a tué ma belle petite fille, et cette personne est libre comme l’air, a déploré l’ancien chef de la police locale, la voix écorchée par les sanglots. Son arrestatio­n ne me ramènera jamais ma fille, mais je ne veux surtout pas qu’il récidive. »

Puisque les policiers de Kativik n’ont pas le niveau de service nécessaire pour enquêter sur un meurtre, c’est la Sûreté du Québec qui a été déployée.

Or, en raison de la grande distance qui sépare la division des crimes contre la personne du petit village d’Inukjuak, la famille de la jeune Bethany Epoo n’a été informée que 24 heures après la découverte du corps.

« UNE TORTURE »

« C’est petit ici, et les rumeurs vont vite, a dit M. Epoo. On s’en doutait, évidemment, mais en tant que parents, on garde l’espoir aussi longtemps qu’on peut. Ç’a été comme une torture pour nous. »

L’adolescent­e, qui venait de décrocher son premier emploi dans une garderie, est partie de chez elle le vendredi en fin de soirée pour aller faire un tour de scooter. Elle a été vue pour la dernière fois vers 3 h du matin, alors qu’elle quittait une résidence du village où elle et ses amis avaient passé la soirée. Le crime aurait eu lieu alors qu’elle retournait chez elle. Bethany Epoo n’est jamais rentrée.

Ses parents ne se sont toutefois pas

CONFIRMATI­ON REDOUTÉE

« QUELQU’UN A TUÉ MA BELLE PETITE FILLE, ET CETTE PERSONNE EST LIBRE COMME L’AIR. » – Jobie Epoo, père de la victime

inquiétés immédiatem­ent puisque l’adolescent­e avait l’habitude de dormir chez ses amies et de revenir pour le souper le lendemain. Or, en fin d’après-midi, Jobie Epoo a commencé à remuer ciel et terre pour retrouver sa fille. En vain.

Quelques heures plus tard, un large périmètre de sécurité a été érigé à une soixantain­e de mètres de chez lui.

Il a tenté d’en savoir plus auprès des policiers locaux qui montaient la garde, mais ceux-ci ne pouvaient pas lui révéler l’identité de la victime. Lorsqu’il a mentionné que sa fille était portée disparue, un agent a semblé soudaineme­nt plus intéressé.

« Il m’a demandé si elle avait des broches, ce qui est le cas, et m’a demandé de lui montrer une photo d’elle, a-t-il raconté. Je savais ce que ça voulait dire, mais je ne voulais pas y croire. »

Le lendemain au soir, la confirmati­on redoutée par la famille est finalement arrivée. Les enquêteurs de la SQ, qui avaient improvisé un poste de contrôle dans une école du village, ont invité les parents de l’adolescent­e à venir identifier la victime.

« Ils nous ont montré une photo du cadavre de Bethany, a laissé tomber M. Epoo, la voix tremblante. C’était elle, j’ai reconnu ses vêtements. »

La SQ poursuit son enquête et indique qu’aucune arrestatio­n liée au meurtre de la jeune fille n’a été effectuée jusqu’ici. Les résultats à venir de certaines analyses pourraient faire avancer le dossier.

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PHOTO FACEBOOK La jeune Bethany Epoo est dépeinte comme un véritable rayon de soleil par sa famille et ses amis. En mortaise, son père Jobie Epoo.
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