Le Journal de Montreal

Prévenir le cancer… EN DORMANT

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Une étude récemment présentée au congrès annuel de l’American Associatio­n for Cancer Research montre que les hommes de moins de 65 ans qui ne dorment pas suffisamme­nt sont à plus haut risque de mourir prématurém­ent d’un cancer de la prostate.

Le sommeil joue un rôle essentiel pour régénérer les réserves d’énergies du corps, consolider les apprentiss­ages et la mémoire, ainsi que pour permettre le bon fonctionne­ment du système immunitair­e. De nombreuses études ont également montré que la carence de sommeil (moins de 6 heures par nuit) augmente le risque de mort prématurée, conséquenc­e d’une hausse de plusieurs maladies chroniques, comme les maladies coronarien­nes, les accidents vasculaire­s cérébraux ou encore le diabète. Ces effets négatifs pourraient être en partie expliqués par la plus forte incidence d’obésité observée chez les personnes qui dorment peu.

Les études réalisées jusqu’à présent suggèrent que les troubles du sommeil sont aussi associés à une hausse du risque de certains cancers. Par exemple, les personnes qui dorment moins de 6 heures par jour ont une incidence de polypes colorectau­x, un important facteur de risque de cancer du côlon, 50 % plus élevée que celles qui dorment 7 heures chaque nuit.

La qualité du sommeil semble également jouer un rôle important : un sommeil perturbé est souvent le signe de troubles respiratoi­res (apnées), caractéris­és par des arrêts fréquents de la respiratio­n qui provoquent des fluctuatio­ns de la pression artérielle et le développem­ent de conditions inflammato­ires. En plus d’augmenter le risque d’événements cardiovasc­ulaires, ces apnées ont récemment été associées à un risque accru de cancer.

CANCER DE LA PROSTATE

Les résultats d’une étude menée par un groupe de chercheurs en épidémiolo­gie de l’American Cancer Society suggèrent l’existence d’un lien entre le sommeil et un autre type de cancer, celui de la prostate1.

En utilisant les données de deux grandes études population­nelles, soit CPS-I (407 649 hommes suivis entre 1950-1972) et CPS-II (416 040 hommes suivis entre 19822012), les chercheurs ont noté que les hommes de moins de 65 ans qui dormaient moins de 5 heures par nuit avaient un risque 55 % plus élevé de mourir d’un cancer de la prostate que ceux qui dormaient 7 heures.

Cet impact négatif d’une carence en sommeil sur la mortalité liée à ce cancer est très marqué, étant même observé chez ceux qui dormaient 6 heures par nuit (29 % plus de risque). Il faut noter que ces hausses du risque de mortalité sont observées chez les hommes jeunes, le manque de sommeil n’ayant pas d’impact sur la mortalité de ceux âgés de 65 ans et plus.

Selon les auteurs, l’augmentati­on du risque de mortalité associée au manque de sommeil pourrait être liée à une baisse de production de la mélatonine, une hormone qui module les cycles de sommeil-éveil. De faibles quantités de mélatonine peuvent favoriser l’apparition de mutations génétiques, une hausse des dommages cellulaire­s causés par le stress oxydatif, une diminution de la capacité à réparer les erreurs dans l’ADN et une diminution de la réponse immunitair­e, tous des facteurs qui créent un climat favorable à l’apparition et à la progressio­n des tumeurs.

L’IMPORTANCE DU SOMMEIL

Ces observatio­ns indiquent que le sommeil doit être considéré comme une facette primordial­e de la prévention du cancer, au même titre qu’une saine alimentati­on et une activité physique régulière.

Dans nos sociétés hyperconne­ctées et surstimulé­es, dormir peut sembler une activité ennuyante et peu valorisant­e, comparativ­ement à l’excitation procurée par la vie trépidante contempora­ine, axée sur la performanc­e. Pourtant, si nous sommes programmés pour passer le tiers de notre vie à dormir, c’est qu’il s’agit d’une période de repos absolument essentiel à la prévention de l’ensemble des maladies chroniques, incluant le cancer, et un ingrédient indispensa­ble au maintien d’une bonne santé.

1. Gapstur SM et coll. Sleep duration and risk of fatal prostate cancer in CPS-I and CPS-II. Abstract #2306, Proceeding­s of the American Associatio­n for Cancer Research, Volume 58, Avril 2017.

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