Pyongyang précise son plan d’attaque
Le président américain, Donald Trump, a quant à lui redoublé de virulence face au régime de Kim Jong-un
SÉOUL | (AFP) Pyongyang a présenté, hier, son projet détaillé pour tirer une salve de quatre missiles au-dessus du Japon vers le territoire américain de Guam, dans le Pacifique, surenchère dans sa confrontation avec Donald Trump, accusé d’avoir « perdu la raison ».
Ce plan visant un avant-poste stratégique des forces américaines sur la route de l’Asie constituera « un avertissement crucial aux États-Unis », a prévenu la Corée du Nord. Car d’après elle « seule la force absolue » aura un effet sur le président américain.
Loin d’essayer de faire retomber la fièvre, Donald Trump a, de son côté, redoublé de virulence, hier, face à Pyongyang.
Accusé par le régime de Kim Jongun d’avoir perdu la raison, le président américain a défendu sa formule controversée sur « le feu et la colère » promise à Pyongyang, estimant qu’elle n’était « peut-être pas assez dure ».
CRAINTES
« Il est grand temps que quelqu’un parle haut et fort pour les habitants de notre pays et les habitants d’autres pays », a-t-il déclaré, depuis son golf de Bedminster, dans le New Jersey, où il passe des vacances.
Cette guerre rhétorique autour des programmes balistique et nucléaire de Pyongyang alimente les craintes d’une erreur de calcul qui aurait des consé- quences catastrophiques sur la péninsule coréenne et au-delà.
En juillet, le Nord a mené deux tirs réussis de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM), mettant une bonne partie du continent américain à sa portée.
FRAPPES PRÉVENTIVES ?
Interrogé sur d’éventuelles frappes préventives, M. Trump s’est refusé à tout commentaire. « Nous ne nous exprimons pas là-dessus. Je ne le fais jamais […] Nous verrons ce qui se passera », a-t-il dit, au lendemain d’un tweet menaçant dans lequel il insistait sur la puissance de l’arsenal nucléaire américain.
La région risque « une minicrise des missiles cubains », a jugé John Delury, professeur à l’Université Yonsei de Séoul. En 1962, l’installation de fusées nucléaires soviétiques à Cuba avait provoqué une surenchère et fait craindre à la planète une guerre atomique.
Réaffirmant que la Chine, principal partenaire économique de Pyongyang, pouvait « faire beaucoup plus » pour mettre la pression sur le régime de Kim Jong-un, le président américain a affiché sa conviction que les lignes allaient bouger sur ce front. « Ils savent ce que j’en pense. Cela ne va pas continuer comme ça », a-t-il affirmé.
Dans ce climat tendu, l’Union européenne a annoncé, hier, avoir ajouté de nouvelles personnalités et entités nord-coréennes sur sa liste noire, qui comprend désormais 103 personnes et 57 entités, dont la banque étatique Foreign Trade Bank (FTB).
QUATRE MISSILES
Les propos incendiaires de M. Trump sont autant « d’absurdités », a déclaré le général Rak-Gyom, commandant des forces balistiques nord-coréennes, cité par l’agence officielle KCNA. « Un dialogue sensé n’est pas possible avec un gars comme ça qui a perdu la raison ».
L’armée nord-coréenne apportera les touches finales à son projet contre Guam d’ici la mi-août et le soumettra pour évaluation au jeune dirigeant nord-coréen, a-t-il ajouté.
Quatre missiles seront tirés simultanément et survoleront les préfectures japonaises de Shimane, Hiroshima et Koichi, a expliqué l’armée.
Les engins « voleront 17 minutes et 45 secondes sur une distance de 3356,7 km, et s’écraseront en mer à 30 ou 40 km de Guam ». Ils s’abîmeraient ainsi à l’extérieur des eaux territoriales américaines.
Les tensions sur la péninsule coréenne tendent à s’aggraver au moment des exercices militaires conjoints entre Séoul et Washington. Or, les prochains commencent autour du 21 août.
NÉGOCIER
Plusieurs solutions de sortie de crise sont toutefois envisagées par les analystes.
La Corée du Nord dispose de l’arme nucléaire, et, selon le Washington Post, le renseignement militaire américain en est désormais convaincu : Pyongyang a réussi à miniaturiser suffisamment une bombe atomique pour l’embarquer sur l’un de ses missiles intercontinentaux.
Il faut accepter le fait que la Corée du Nord possède maintenant des armes nucléaires, ce qui rend toute action militaire impossible, car trop dangereuse, expliquent certains spécialistes.
« Pour les États-Unis, il ne reste plus qu’à négocier avec la Corée du Nord, pour essayer de réduire les tensions et résoudre certains conflits. Il ne faut plus essayer de leur enlever l’arme nucléaire », développe Jeffrey Lewis, chercheur à l’Institut Middlebury des études internationales.
EN CAS DE GUERRE
Les scénarios du Pentagone en cas d’intervention militaire varient de la frappe chirurgicale sur des cibles précises à l’attaque préventive pour pousser à un soulèvement de la population nord-coréenne et renverser Kim Jong-un.
Mais toute intervention armée entraînerait de la part de Pyongyang des conséquences difficiles à imaginer précisément, mais à la gravité certaine.