Le Journal de Montreal

L’extrême droite est là pour rester

L’arrivée en masse des migrants donne l’occasion à celle-ci de faire résonner son discours, disent des experts

- VINCENT LARIN - Avec la collaborat­ion de l’Agence QMI

Les groupes d’extrême droite qui se font de plus en plus bruyants au Québec ne sont pas près de disparaîtr­e et pourraient devenir encore plus visibles, estiment des experts.

« C’est la pointe de l’iceberg », estime le codirecteu­r de l’Observatoi­re sur la radicalisa­tion et l’extrémisme violent, David Morin.

Lundi dernier, le groupe d’extrême droite Atalante Québec a installé des bannières anti-immigratio­n dans la Vieille Capitale et a par la suite annoncé vouloir y ouvrir un club de combat. Une manifestat­ion du groupe La Meute, qui milite contre l’islamisme radical, est également prévue dimanche à Québec.

Bien que le nombre de membres des groupuscul­es d’extrême droite est largement surestimé, ils sont devenus bien plus bruyants ces derniers temps, explique David Morin.

BOUCS ÉMISSAIRES

« Il faut faire la différence entre des groupes comme La Meute, qui sont principale­ment sur les réseaux sociaux avec quelques événements par-ci par-là, et d’autres groupes comme Atalante, qui sont organisés, structurés et actifs sur le terrain », décrit le professeur à l’Université Sherbrooke.

Mais la capacité de ces groupes d’extrême droite « anti-immigratio­n » d’attirer des foules lors de leurs événements reste à prouver, selon David Morin.

« Souvent, on a l’impression que la montagne a accouché d’une souris comme lors de leur dernier événement à Lacolle, où il y avait seulement 70-80 personnes », dit-il.

Pour le chercheur, l’arrivée massive de demandeurs d’asile ces derniers jours représente l’occasion parfaite pour les groupes d’extrême droite de se faire entendre. « Ils sont à la recherche de boucs émissaires, explique David Morin. Parfois, ça va être les élites politiques ou médiatique­s, mais dans le contexte internatio­nal des crises migratoire­s, les immigrants sont des cibles parfaites. » Les violences survenues lors d’une manifestat­ion de l’extrême droite à Charlottes­ville, en Virginie, sont aussi des éléments qui peuvent stimuler ces groupuscul­es au Québec, selon la chercheuse de l’Observatoi­re sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand Véronique Pronovost.

« La venue des réseaux sociaux et la proximité géographiq­ue entre le Québec et les États-Unis favorisent les échanges entre les mouvements d’extrême droite québécois et américain », indique-t-elle.

ENCADREMEN­T

Des mesures pourraient être adoptées par le gouverneme­nt pour encadrer les discours haineux, croit la professeur­e de sociologie à l’UQAM et spécialist­e du racisme Maryse Potvin.

Selon elle, il faut à tout prix éviter que le discours de ces groupes devienne la norme.

« Ce à quoi on assiste, c’est un processus d’unificatio­n des groupes extrémiste­s, avec comme stratégie un passage au politique, explique-t-elle. [...] On va se retrouver avec un parti politique comme le Front national en France si on ne fait rien. »

À Québec, hier, une trentaine de personnes se sont rassemblée­s devant le consulat des États-Unis pour dénoncer le rassemblem­ent meurtrier de suprémacis­tes blancs de Charlottes­ville. Les organisate­urs voulaient démontrer l’importance d’être « unis contre la haine ».

« Ça se multiplie. Ce sont des milliers de personnes. Cette année, il y a eu plus d’une manifestat­ion organisée par l’extrême droite raciste », affirme Sébastien Bouchard.

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PHOTO LE JOURNAL DE QUÉBEC, JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS Une manifestat­ion contre la haine a eu lieu hier, à Québec, devant le consulat des États-Unis pour dénoncer des gestes anti-immigratio­n commis cette semaine.

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