Le gouvernement et l’industrie forestière se renvoient la balle
Le provincial assure ne pas avoir permis des coupes pendant un moratoire
Le gouvernement provincial nie avoir attribué des droits de coupes forestières pendant le moratoire censé protéger l’habitat du caribou.
Jusqu’en 2013, « l’industrie avait la planification forestière entre les mains », indique Francis Forcier, ingénieur forestier et directeur stratégique au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec (MFFP).
C’est seulement après le moratoire de l’Entente boréale qu’avaient signée les compagnies et les écologistes, entre 2010 et 2012, que l’État a pris le contrôle de la forêt publique et a commencé à attribuer des territoires de coupes, indique le fonctionnaire.
Avant cela, « ils [les compagnies] avaient toute la latitude possible pour décider où ils allaient », insiste M. Forcier.
M. Forcier, qui avait jusqu’ici refusé les demandes d’entrevue du Journal, réagissait à un reportage paru hier dans nos pages. Un porte-parole de l’industrie y indiquait n’opérer sur le terrain qu’avec le feu vert de Québec.
Sauf que l’ingénieur du ministère souligne de son côté qu’avant 2013, le respect d’un moratoire de coupe était du plein ressort des compagnies, et l’État ne pouvait y jouer aucun rôle, d’autant plus qu’il était exclu de l’Entente boréale tout comme les Premières Nations.
AIRE PROTÉGÉE
En janvier, l’ingénieur avait déclaré au Journal que le gouvernement annoncerait cette année une aire protégée dans le secteur des montagnes Blanches, au nord du Saguenay–Lac-Saint-Jean, une zone très fréquentée par les caribous.
Huit mois plus tard, M. Forcier assure qu’« on est très très avancé dans le dossier ». Il s’agirait d’une grande aire protégée de plus de 10 000 km2.
Pier-Olivier Boudreault, biologiste à la Société pour la Nature et les Parcs (SNAP), presse Québec de ne pas tarder.
« Les coupes sont vraiment à la porte des montagnes Blanches et il y a des projets de coupe dans certains secteurs à l’intérieur, au nord du réservoir Manouane », dit-il.
Près de 280 000 hectares de forêt ont déjà été abattus dans le secteur entre 2001 et 2010, d’après des analyses satellitaires faites par Global Forest Watch.
CHANGEMENTS CLIMATIQUES
« Si la désignation de grands espaces de protection vient réduire la possibilité forestière, ça risque de nous impacter », prévient pour sa part Karl Blackburn, le porte-parole de Produits Forestiers Résolu.
Il plaide que l’industrie doit en plus s’adapter aux changements climatiques qui risquent de déplacer la possibilité forestière.
En effet, plusieurs essences résineuses commerciales comme le pin gris, l’épinette blanche, le mélèze laricin et le sapin baumier « présenteraient des risques élevés de déclin sur plus de 20 % de leur aire de référence », d’après une étude gouvernementale.