La vraie nature du président américain
C’est dans les moments dramatiques de crise qu’un président révèle la vraie nature de sa personnalité et sa capacité ou non d’agir comme rassembleur. Après les événements tragiques de samedi en Virginie, Donald Trump a lamentablement échoué à ce test.
À Charlottesville, des groupes d’extrême droite, des sympathisants du KKK et des néonazis protestaient le démantèlement d’une statue de Robert E. Lee, commandant de l’armée sudiste lors de la guerre de Sécession.
Ces manifestations avaient des airs d’intimidation et de provocation et ont entraîné d’importantes contre-manifestations, qui se sont terminées tragiquement lorsqu’un sympathisant néonazi a foncé sur la foule avec sa voiture.
Dans les circonstances, la seule réponse acceptable de la part d’un président était de condamner sans équivoque les instigateurs de ces événements, leur idéologie haineuse et l’acte de terrorisme meurtrier qu’ils ont inspiré.
Pourtant, Donald Trump a insisté samedi pour distribuer également le blâme entre les manifestants d’extrême droite et leurs opposants.
CHASSEZ LE NATUREL…
Donald Trump a abdiqué toute prétention à l’autorité morale que devrait exercer un président.
Devant le tollé, il a reculé lundi en lisant sans conviction un texte qui condamnait explicitement et nommément les groupes d’extrême droite.
Ce rattrapage aurait pu donner un vernis d’acceptabilité à sa réponse et réconforter ses alliés républicains, mais le naturel de Trump est revenu au galop mardi, alors qu’il réaffirmait de façon véhémente que la responsabilité des violences incombait à tous les côtés.
En insistant pour juger équivalents les agissements violents d’individus animés par le racisme et l’idéologie nazie et les réactions de ceux qui s’opposent à ces idées haineuses, Donald Trump a abdiqué toute prétention à l’autorité morale que devrait exercer un président.
GAFFES ET DÉSAVEU
En plus de donner un élan aux défenseurs d’idées répugnantes qui voient en lui un héros, Trump a démontré son manque de jugement politique en comparant les leaders sudistes dont on souhaite déboulonner les statues aux pères fondateurs du pays.
Les condamnations des réactions de Trump sont pratiquement unanimes. Tous les républicains qui se sont prononcés sur ses réactions les ont vertement condamnées.
Pour dissocier leurs firmes d’un président dont la désapprobation atteignait des niveaux record avant même ces événements, des chefs d’entreprises ont abandonné les conseils consultatifs où Trump les avait invités à siéger. Craignant de subir de nouveaux refus, Trump a aboli ces conseils.
UN PRÉSIDENT ISOLÉ
Pour le président, ce désaveu des plus grands dirigeants d’entreprises est une humiliation qui fait mal, personnellement et politiquement.
Pour Trump, qui s’est longtemps senti exclu de l’élite économique, l’appui de ces dirigeants représentait une douce vengeance personnelle. Politiquement, il lui sera pratiquement impossible de passer sa réforme de la fiscalité sans l’appui de ces mêmes chefs d’entreprises.
Finalement, alors que l’enquête sur la filière russe progresse et que le spectre de la destitution flotte sur la capitale, la dernière chose dont Donald Trump a besoin est un bloc de législateurs républicains déterminés à se débarrasser d’un président indéfendable. Il en fait pourtant beaucoup pour leur faciliter la tâche.