Le Journal de Montreal

L’anglais n’est pas en hausse au Québec

Des données corrigées par Statistiqu­e Canada révèlent que l’anglais recule au même titre que le français

- CHRISTOPHE­R NARDI

OTTAWA | Pour une première fois depuis 2001, l’anglais n’est pas en hausse au Québec, révèle Statistiqu­e Canada. L’agence avait pourtant affirmé le contraire en dévoilant des données erronées du recensemen­t 2016 il y a deux semaines.

Ceux qui disent parler l’anglais à la maison représente­nt désormais 7,5 % de la population québécoise, comparativ­ement à 7,7 % en 2011. Or, c’est le premier recensemen­t depuis celui de 2001 à 2006 qui indique un repli de la langue de Shakespear­e au Québec.

Pour sa part, le français a reculé de 1 % et est la langue maternelle de 77.1 % de la population, comparativ­ement à 78.1 % en 2011.

C’est un contraste important comparativ­ement aux premiers résultats erronés publiés par l’organisme fédéral il y a deux semaines, où on indiquait que la population anglophone avait bondi alors que le français reculait encore plus rapidement.

Finalement, jusqu’à 57 000 Québécois avaient été mal classés comme anglophone­s à cause d’erreurs informatiq­ues et humaines, a révélé Statistiqu­e Canada hier matin.

« C’est très clair qu’au Québec, depuis 2001, la proportion de la langue anglaise était en hausse un peu partout. Ce qu’on remarque maintenant, depuis 2011, est un renverseme­nt de cette tendance. Tout semblait indiquer qu’il y avait une croissance de cette langue mais, clairement, on l’a surestimée », admet Jean-Pierre Corbeil, directeur adjoint à Statistiqu­e sociale et autochtone.

RECUL DES ANGLOPHONE­S

Or, le fait que le nombre de Québécois ayant l’anglais comme langue maternelle ou comme langue principale à la maison soit en chute n’étonne pas du tout les experts.

« Les nouveaux résultats sont nettement plus représenta­tifs de la réalité des anglophone­s et de la stabilisat­ion de leur population qu’on remarque depuis les dernières années à cause des départs vers d’autres provinces et de l’augmentati­on de l’immigratio­n », analyse Jack Jedwab, vice-président de l’Associatio­n d’études canadienne­s.

« L’anglais recule partout au Canada au profit des immigrants de langue tierce, et il n’y avait pas de raison qui expliquera­it pourquoi le Québec irait à l’inverse de cette tendance. L’augmentati­on des anglophone­s dévoilée le 2 août dernier ne faisait aucun sens. Personne ne savait où ils étaient cachés », s’est exclamée pour sa part Anne Robineau de l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiq­ues.

Le 2 août, l’organisme avait publié un premier portrait linguistiq­ue, mais a dû modifier ses données à la suite d’une litanie de protestati­ons d’experts linguistiq­ues qui remettaien­t en question l’augmentati­on des anglophone­s au Québec.

FORMULAIRE

La direction de Statistiqu­e Canada a admis la semaine dernière qu’une erreur s’était glissée dans la lecture de 61 000 formulaire­s de recensemen­t, la grande majorité étant au Québec.

Hier, la direction a expliqué que l’origine du problème est dans un formulaire de suivi envoyé aux personnes qui ne complétaie­nt pas bien le recensemen­t du premier coup.

Dans ce deuxième formulaire, l’anglais était le premier choix de langue maternelle et langue parlée à la maison dans le document anglais, mais l’ordre était inversé sur les formulaire­s francophon­es, et le français était au sommet de la liste de choix.

Or, le système informatiq­ue croyait que l’anglais était le premier choix sur tous les documents, ce qui fait que les 61 000 personnes qui ont rempli le formulaire de suivi en français se sont fait attribuer l’anglais comme langue maternelle.

Finalement, c’est une « erreur humaine » qui a fait que le problème n’a jamais été décelé par l’organisme.

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JEAN-PIERRE CORBEIL Statistiqu­e Canada

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