La Couronne fédérale réclame neuf ans contre un Montréalais
Il voulait se rendre en Syrie pour aller combattre au sein de l’État islamique
Le premier adulte québécois coupable de terrorisme doit servir d’exemple pour dissuader les Canadiens voulant se joindre aux terroristes à l’étranger, a martelé la Couronne, qui réclame une peine de neuf ans de pénitencier.
« Il faut contrer le phénomène mondial des combattants étrangers », a affirmé Me Lyne Décarie, hier, lors des observations sur la peine à imposer à Ismaël Habib au palais de justice de Montréal.
Habib, 29 ans, voulait à tout prix rejoindre le groupe État islamique (ÉI) entre 2014 et 2016. Comme il était déjà fiché par la Gendarmerie royale du Canada et que son passeport avait été révoqué, il avait tenté de se faire passer pour son frère jumeau afin d’obtenir le précieux document.
PIÉGÉ
Son plan n’a pas fonctionné, si bien qu’il s’est mis à chercher d’autres moyens pour se rendre en Syrie. C’est là qu’il a rencontré un groupe criminel qui lui a proposé de lui faire traverser l’Atlantique en conteneur. Ce que le terroriste ignorait, c’est qu’il s’agissait de policiers qui tentaient de lui soutirer des aveux.
Lors d’un entretien avec le « patron » de ces faux gangsters, Habib avait alors affirmé qu’il voulait partir faire le djihad. Cela lui permettrait de mourir en martyr et d’obtenir 72 vierges, comme l’indiquent ses croyances.
« Il épouse totalement l’idéologie de l’ÉI, il sait dans quoi il s’embarque, a plaidé Lyne Décarie. Il ne s’en allait pas là pour mettre des bandages. »
Lors de son procès, Habib avait juré avoir fait ses aveux pour se rendre intéressant, mais le juge Serge Delisle ne l’a pas cru. Il avait aussi tenté d’expliquer qu’il voulait aller sauver sa femme et ses enfants en Syrie, mais là encore, il n’a pas convaincu le magistrat, qui a même qualifié de « rocambolesque » le récit de l’accusé.
TROP SÉVÈRE
Si Me Charles Montpetit, de la défense, est d’accord pour dire que la sentence se doit de dissuader tous ceux qui seraient tentés d’imiter Habib, il trouve qu’une peine de neuf années d’incarcération est beaucoup trop sévère.
« Neuf ans? Neuf ans pour un jeune homme qui n’a pas d’antécédents crimi- nels ? Ça prendrait combien d’années pour quelqu’un dans le crime organisé pour recevoir une telle sentence ? »
D’autant plus que rien dans la preuve ne laisse croire que Habib voulait commettre un acte terroriste au Canada.
« Il a dit [aux faux gangsters] qu’il ne croyait pas aux bienfaits du terrorisme au Canada », a renchéri l’avocat. Selon Me Montpetit, une condamnation de six ans et demi de pénitencier serait plus appropriée, d’autant plus qu’il est détenu depuis l’an passé.
« Dans tout ça, il y a des souffrances, il n’a pas de nouvelles de sa femme et de ses enfants, une partie de lui se questionne sur le bien-fondé de ses idéaux, si ça en valait la peine. »
Habib connaîtra sa sentence à la fin du mois de septembre.