Appellation pour les eaux-de-vie d’ici
Une subvention est octroyée par le gouvernement provincial pour la réalisation d’une étude d’opportunité
QUÉBEC | L’Association des distilleries artisanales du Québec (ADAQ) souhaite créer une appellation contrôlée pour que les eaux-de-vie produites ici, dont la matière première jusqu’à l’embouteillage est « 100 % Québec », se distinguent sur les tablettes de la SAQ.
L’ADAQ vient de franchir une nouvelle étape pour obtenir une telle certification – qui pourrait prendre forme sous le sceau « Eaude-vie du Québec » –, alors que le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) lui a octroyé une subvention de 15 000 $ pour la réalisation d’une étude d’opportunité sur le projet.
Depuis quelques années à la SAQ, les consommateurs voient se multiplier les spiritueux sous la bannière Origine Québec.
La majorité de ces précieux liquides ont comme matière première un alcool de grains neutre distillé en Ontario. Ces gins, vodkas et autres spiritueux sont produits par des entreprises québécoises détenant un permis de production industrielle.
« Je n’ai rien contre ça, ce sont de très bonnes entreprises, mais le problème, c’est que le consommateur pense vraiment que c’est québécois, tandis que l’alcool n’est pas du Québec », a expliqué au Journal Éric Lafrance, copropriétaire du Domaine Lafrance et président de l’ADAQ, qui compte 26 membres aux quatre coins du Québec.
ENCORE RARES
Pour l’instant, le Domaine Lafrance, un verger, est l’un des rares qui produit et vend de l’eau-de-vie « de la terre à la bouteille », comme l’image M. Lafrance. Mais avec le nouveau permis de production artisanale pour alcools et spiritueux maintenant à la disposition des producteurs du Québec, M. Lafrance estime qu’on en verra de plus en plus.
« La distillation, ce n’est pas sorcier. Ça prend un liquide qui a été fermenté avec des matières premières, soit la pomme, le raisin, l’érable, le miel… Une fois distillé, on se retrouve avec un alcool obtenu naturellement avec l’aide d’un alambic », expose le producteur, qui mentionne par exemple que des vignobles pourraient créer de tout nouveaux produits à partir de leurs raisins.
« Ce n’est pas pour faire une guerre aux autres producteurs que l’on veut une appellation contrôlée, mais pour encourager les producteurs québécois et pour démontrer aux consommateurs qu’il y a du travail et un artisan en arrière de ça », soutient le copropriétaire du Domaine Lafrance, dont le gin Dandy dit « 100 % québécois » est vendu à la SAQ.
« C’est plus coûteux à produire, souligne M. Lafrance. Notre alcool nous coûte dix fois plus cher qu’un autre gin à la SAQ », soutient-il.
À l’Association des microdistilleries du Québec (AMDQ), qui représente une quinzaine de membres détenant des permis de production industrielle – dont la plupart utilisent un alcool neutre distillé en Ontario –, on se dit favorable au projet mené par l’ADAQ.
NUANCE IMPORTANTE
Toutefois, son président, également cofondateur de la microdistillerie Les Subversifs, tient à apporter une nuance. « De prendre de la mélasse, de la faire fermenter et distiller, ce ne sera pas un rhum d’origine québécoise, c’est impossible, on n’a pas de cannes à sucre. Mais ça va être un rhum québécois. Cette nuance-là est importante, insiste Stéphan Ruffo, citant en exemple les microbrasseries.
Ce sont des bières québécoises, mais les grains ne viennent pas du Québec », souligne-t-il.