Le Journal de Montreal

Un avocat montréalai­s accusé d’entrave à la justice

Il aurait participé à la mise en ligne d’une vidéo incriminan­te d’un témoin

- MICHAËL NGUYEN

Un avocat montréalai­s accusé d’avoir aidé un meurtrier à diffuser sur internet la déclaratio­n d’un délateur gênant s’est défendu, hier devant le tribunal, d’avoir commis un acte criminel.

« Je n’ai rien fait qui, selon moi, serait illégal » a clamé Me Dimitrios Strapatsas lors de son témoignage au Centre judiciaire Gouin, à Montréal.

L’avocat criminalis­te, connu pour avoir défendu le fils de l’ancien Hells Angels Maurice « Mom » Boucher, est accusé d’entrave à la justice dans un dossier de meurtre.

L’affaire remonte à 2015, quand Dimitrios Strapatsas défendait John Boulachani­s, un accusé condamné à la prison à vie pour un meurtre au premier degré. Les deux hommes se connaissai­ent depuis l’adolescenc­e, bien qu’ils s’étaient perdus de vue pendant plus d’une décennie.

« UN RAT SALE »

Comme un accusé a accès à toute la preuve recueillie contre lui, Boulachani­s a alors appris qu’un codétenu, à qui il avait fait des déclaratio­ns incriminan­tes, allait témoigner contre lui.

La police avait rencontré ce délateur, qui ne peut être identifié, et tout l’interrogat­oire avait été filmé.

« Boulachani­s aimerait le voir disparaîtr­e », a d’ailleurs témoigné hier un autre détenu, dont le nom est lui aussi frappé d’un interdit de publicatio­n.

Selon ce témoin, Boulachani­s lui a demandé de l’aider à mettre en ligne une vidéo, en lui faisant croire que c’était pour dénoncer les conditions de détention à l’établissem­ent Rivière-des-Prairies. En échange, le meurtrier était prêt à lui payer 200 $.

« UN RAT SALE »

« J’avais besoin d’argent, ça ne m’a pas dérangé pantoute », a affirmé le témoin.

Ce dernier a alors demandé l’aide de sa conjointe, qui s’est rapidement exécutée. Le CD qui lui a été remis par Boulachani­s contenait la déclaratio­n du délateur avec un mode d’emploi.

« C’est un délateur, une vidange et un rat sale », était-il écrit dans le mode d’emploi.

Une fois la vidéo sur internet, la femme a contacté Dimitrios Strapatsas pour être payée, tel qu’il avait été convenu. Après quelques échanges par message texte, la femme s’est rendue dans un Tim Hortons de Montréal, où l’avocat lui a remis 200 $ en billets de 20 $.

L’avocat jure qu’il ignorait la raison pour laquelle il remettait de l’argent à cette femme. Il n’a fait que répondre à une demande de Boulachani­s, dit-il.

« Vous ne trouvez pas que c’est de l’aveuglemen­t volontaire ? » lui a demandé Jennifer Morin, de la Couronne, tout en soulevant que l’avocat n’avait conservé aucun des textos de cette affaire.

Dimitrios Strapatsas a répondu que non, tout en affirmant qu’il n’aurait jamais accepté de commettre un acte illégal.

La vidéo a finalement été retirée du web, quand la femme qui l’avait mise en ligne a réalisé qu’il s’agissait d’un témoignage dans une affaire de meurtre. Boulachani­s a dit s’être trompé de CD, tout en ajoutant être quand même content d’avoir diffusé l’identité du délateur.

Le procès se poursuit aujourd’hui.

 ?? PHOTO MARTIN ALARIE ?? Dimitrios Strapatsas, un avocat criminalis­te avec 10 ans d’expérience, s’est présenté hier au Centre judiciaire Gouin, à Montréal, pour se défendre des accusation­s d’avoir commis une entrave à la justice dans une affaire de meurtre.
PHOTO MARTIN ALARIE Dimitrios Strapatsas, un avocat criminalis­te avec 10 ans d’expérience, s’est présenté hier au Centre judiciaire Gouin, à Montréal, pour se défendre des accusation­s d’avoir commis une entrave à la justice dans une affaire de meurtre.
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JOHN BOULACHANI­S Meurtrier

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