Un avocat montréalais accusé d’entrave à la justice
Il aurait participé à la mise en ligne d’une vidéo incriminante d’un témoin
Un avocat montréalais accusé d’avoir aidé un meurtrier à diffuser sur internet la déclaration d’un délateur gênant s’est défendu, hier devant le tribunal, d’avoir commis un acte criminel.
« Je n’ai rien fait qui, selon moi, serait illégal » a clamé Me Dimitrios Strapatsas lors de son témoignage au Centre judiciaire Gouin, à Montréal.
L’avocat criminaliste, connu pour avoir défendu le fils de l’ancien Hells Angels Maurice « Mom » Boucher, est accusé d’entrave à la justice dans un dossier de meurtre.
L’affaire remonte à 2015, quand Dimitrios Strapatsas défendait John Boulachanis, un accusé condamné à la prison à vie pour un meurtre au premier degré. Les deux hommes se connaissaient depuis l’adolescence, bien qu’ils s’étaient perdus de vue pendant plus d’une décennie.
« UN RAT SALE »
Comme un accusé a accès à toute la preuve recueillie contre lui, Boulachanis a alors appris qu’un codétenu, à qui il avait fait des déclarations incriminantes, allait témoigner contre lui.
La police avait rencontré ce délateur, qui ne peut être identifié, et tout l’interrogatoire avait été filmé.
« Boulachanis aimerait le voir disparaître », a d’ailleurs témoigné hier un autre détenu, dont le nom est lui aussi frappé d’un interdit de publication.
Selon ce témoin, Boulachanis lui a demandé de l’aider à mettre en ligne une vidéo, en lui faisant croire que c’était pour dénoncer les conditions de détention à l’établissement Rivière-des-Prairies. En échange, le meurtrier était prêt à lui payer 200 $.
« UN RAT SALE »
« J’avais besoin d’argent, ça ne m’a pas dérangé pantoute », a affirmé le témoin.
Ce dernier a alors demandé l’aide de sa conjointe, qui s’est rapidement exécutée. Le CD qui lui a été remis par Boulachanis contenait la déclaration du délateur avec un mode d’emploi.
« C’est un délateur, une vidange et un rat sale », était-il écrit dans le mode d’emploi.
Une fois la vidéo sur internet, la femme a contacté Dimitrios Strapatsas pour être payée, tel qu’il avait été convenu. Après quelques échanges par message texte, la femme s’est rendue dans un Tim Hortons de Montréal, où l’avocat lui a remis 200 $ en billets de 20 $.
L’avocat jure qu’il ignorait la raison pour laquelle il remettait de l’argent à cette femme. Il n’a fait que répondre à une demande de Boulachanis, dit-il.
« Vous ne trouvez pas que c’est de l’aveuglement volontaire ? » lui a demandé Jennifer Morin, de la Couronne, tout en soulevant que l’avocat n’avait conservé aucun des textos de cette affaire.
Dimitrios Strapatsas a répondu que non, tout en affirmant qu’il n’aurait jamais accepté de commettre un acte illégal.
La vidéo a finalement été retirée du web, quand la femme qui l’avait mise en ligne a réalisé qu’il s’agissait d’un témoignage dans une affaire de meurtre. Boulachanis a dit s’être trompé de CD, tout en ajoutant être quand même content d’avoir diffusé l’identité du délateur.
Le procès se poursuit aujourd’hui.