Sharapova : déjà la belle histoire !
NEW YORK | Les prémisses d’une belle histoire étaient toutes réunies. Maria Sharapova, la grande Russe belle et élégante, la pécheresse repentie qui avait été boudée par les Français de Roland-Garros et les Anglais de Wimbledon, avait été pardonnée par l’establishment du tennis américain.
Les bonzes l’avaient invitée au US Open. Le Grand Chelem qui complète la saison des titres majeurs. Le plus fou, le plus bruyant, le plus riche et le plus… américain.
Mais Maria-Madeleine avait quand même été punie pour ses péchés. En plus de perdre 19 mois de sa brillante carrière à cause d’une histoire de dopage, le mauvais sort avait désigné la joueuse numéro 2 au monde pour l’affronter. Simona Halep, la vive et coriace Roumaine qu’Eugenie Bouchard battait il y a trois ans. C’était il y a une éternité.
Ce match entre Sharapova et Halep est déjà la belle histoire de ce US Open que la pluie qui s’est acharnée sur New York hier a chamboulé. La preuve, la télé américaine a choisi hier de remontrer le troisième set pendant que la pluie tombait et que Nadal prenait le chemin des douches après avoir gagné son match sous le toit du stade Arthur-Ashe.
SAVOIR PARLER AUX GENS
Sharapova a tout fait bien. Elle n’a pu s’empêcher de pleurer après que la dernière frappe de la Roumaine ait flotté hors des limites du jeu. Le monde aime ces pleurs d’émotion. On pardonne beaucoup à ceux qui ont la larme à l’oeil. Qu’on pense à Joël Legendre.
Après les larmes, est venu le sourire. Et le grand compliment aux 20 000 spectateurs du stade. Ils sont newyorkais pour la plupart, et donc vaniteux et baveux. Pas méchants mais conscients d’habiter LA ville. Et qu’est-ce que Maria leur a dit ?
Qu’ils étaient impressionnants et épeurants mais qu’ils étaient aussi adorables. Pas dans ces mots, c’était bien plus subtil : « J’aime jouer dans le grand stade en heure de grande écoute. Quand j’étais jeune, j’étais terrorisée juste à cette idée. Le trafic, la cohue, le bruit. Mais maintenant, je me sens à la maison », a-t-elle dit en substance.
La foule, déjà debout et ramollie par les larmes, a éclaté en applaudissements. Le message était clair. Nous le peuple américain, nous te pardonnons et nous t’aimons.
D’abord les bonzes qui étaient bien trop contents de pouvoir présenter une aussi grande tête d’affiche et ensuite les fans dans les gradins. La reconquête était complète.
PLUS QUE LE MELDONIUM
Maria Sharapova, c’est tellement plus qu’une sombre histoire de dopage. Les gens n’aiment pas les tricheurs. Mais dans le cas de Sharapova, les circonstances permettaient une certaine tolérance. Le meldonium était un médicament qu’elle prenait depuis 2006 pour des raisons de santé. Ce n’est que le 1er janvier 2015 qu’il a été inscrit sur la liste des produits dopants. C’est à Melbourne, le même mois, qu’elle a raté un test antidopage. L’excuse de l’ignorance a été acceptée par de nombreux amateurs.
Il faut savoir que cette magnifique athlète, qui a été deux fois numéro 1 mondial, est arrivée aux États-Unis à l’âge de sept ans sur la recommandation de Martina Navratilova.
Son père, Youri Sharapov, a été laveur de vaisselle en Floride pour faire vivre sa fille pendant que la mère attendait en Russie un visa lui permettant de rejoindre sa famille aux USA.
Toute sa carrière a été handicapée par des blessures à l’épaule et à l’avant-bras droit. Son style tout en puissance ne pardonne pas les erreurs techniques.
Et c’est à Québec qu’elle a gagné son premier ou son deuxième tournoi alors qu’elle était encore adolescente.
Toutes les joueuses qui ont vomi sur elle après sa suspension et qui continuent à s’acharner sur son épisode de dopage devraient y penser deux fois. Elles ont mauditement besoin d’une star internationale de son calibre.
Qui à part Serena Williams allume la passion des fans parmi les dix premières au monde ? Qui est une vraie star ?
Ça aurait pu être Eugenie Bouchard. Ce qu’elle a accompli en six mois en 2014 n’était pas que de la chance. Elle aurait pu…
Mais avec des « aurait »…