Villeneuve à 320 km/h
Jacques Villeneuve a renoué avec le pilotage d’une F1 à Monza
MONZA | Jacques Villeneuve a hésité quand on lui a proposé d’effectuer quelques tours de piste à bord d’une F1 biplace à la veille des premiers essais en prévision du Grand Prix d’Italie.
« Quand on vous fait ce genre de demande, dit-il, c’est que vous êtes un pilote retiré de la course, un has-been, comme on les appelle, relate-t-il. Or, moi, je ne suis pas rendu là. Pas encore. »
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il refuse catégoriquement de venir interroger les pilotes sur le podium après un Grand Prix. La demande lui a été faite à maintes reprises, à Montréal notamment. La réponse, c’est non.
« Je laisse ça aux autres, dit-il. Aux David Coulthard, Martin Brundle et Mark Webber de ce monde. Ce travail, c’est pour les retraités.
« Mais bon, si j’ai accepté de rouler dans cette F1, c’est parce que c’était à Monza, le temple de la vitesse. Un circuit que j’ai toujours aimé et tellement riche en histoire. »
UN NOM MAGIQUE
À Monza, oui, où le nom Villeneuve est magique. Et le sera pour l’éternité.
Ce fut d’abord Gilles, dont la légende est encore très vivante en Italie. De vieux journalistes, rencontrés hier, qui l’ont suivi dans ses années de gloire n’hésitent pas à le décrire, encore aujourd’hui, comme l’un des cinq pilotes les plus marquants de l’histoire de la F1. C’est tout dire.
Jacques, lui, n’a sûrement pas eu la même attention en Italie, probablement parce qu’il n’a jamais eu la chance d’être recruté par Ferrari comme papa. Mais il demeure le fils de Gilles et un champion du monde par surcroît.
À bord d’une F1 Minardi, de l’année 1998, Villeneuve s’est fait plaisir hier.
À lui voir les yeux éclatants quand des techniciens l’ont attaché dans son cockpit et procédé à la mise à feu du bon vieux V10 Cosworth, dont on regrette aujourd’hui la sonorité, il cachait mal son impatience à vouloir lâcher l’embrayage.
Il était heureux de replonger, le temps de quelques minutes, dans la peau d’un pilote de F1, en arborant son casque aux couleurs d’antan. Du bonbon.
« Non, ça ne se perd pas, a-t-il indiqué à sa sortie de voiture. Tu arrives au premier virage de la piste et tu sais exactement comment te comporter. J’avoue avoir eu une nausée à la première accélération, car l’oreille n’est plus habituée.
« C’est quand même 880 chevaux, les réactions sont foudroyantes, poursuit-il. Le pilotage et le freinage sont précis, c’est génial. »
UNE PASSAGÈRE COMBLÉE
Cette Minardi, conçue pour le programme F1 Experiences, est une F1 à empattement long à laquelle on a ajouté un deuxième baquet derrière le pilote. C’est la présentatrice Frederica Masolin, du réseau Sky Sports Italia, qui a eu l’immense privilège d’être sa passagère. « Je n’ai jamais eu peur sur la piste, juste un peu de douleur au cou quand on a négocié des virages rapides, a-telle raconté au Journal. J’aurais voulu continuer... » Villeneuve s’est évidemment retenu, avoue-t-il. Mais à peine. Il a été chronométré à 320 km/h sur la longue ligne droite devant les puits de ravitaillement. S’il n’a pas roulé plus vite, c’est qu’on a limité la vitesse de la monoplace à ce seuil de tolérance.
« J’ai devancé mes freinages, a indiqué Villeneuve, parce que, justement, quelqu’un était assis derrière moi. Autrement, j’aurais poussé davantage. Je me sentais à l’aise de le faire. »
TROIS PETITS TOURS
Quand on lui a donné les consignes avant de prendre la piste au volant d’une F1 — ce qu’il faisait pour la première fois depuis 2006 —, le responsable lui a demandé de ne boucler que trois tours, dont le premier seul dans la voiture, avant de ranger le bolide dans les puits de ravitaillement.
« Et si je refuse?» lui a demandé Villeneuve à la blague, qui en aurait voulu davantage. On le connaît.
Villeneuve n’a jamais gagné à Monza ni même accédé au podium, contrairement à son père, qui a terminé deuxième en 1979 dans l’une de ses trois participations.
« J’ai connu des malchances, mais peu importe, affirme-t-il. L’important, c’est d’avoir couru ici comme Gilles. Le nom Villeneuve est gravé à jamais en Italie et cent fois plus populaire qu’au Québec. Ça ne se compare pas.
« Les jeunes ici connaissent le nom Villeneuve même s’ils ne nous ont jamais vus courir », a-t-il conclu.