Le Journal de Montreal

Blâme sur un lanceur d’alerte dénoncé

Un ingénieur puni pour avoir voulu avertir le public

- MATTHIEU PAYEN

L’histoire d’un ingénieur blâmé pour avoir informé un média d’un bris sur le pont Champlain remet au premier plan l’importance d’avoir une loi pour protéger les lanceurs d’alertes, estime la Fédération profession­nelle des journalist­es du Québec.

Le Journal a révélé la semaine dernière que Jean-Claude Gilbert a plaidé coupable, le 16 août, devant l’Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ), d’avoir divulgué des informatio­ns sur le pont Champlain à un journalist­e de Radio-Canada.

« Nous sommes déçus de voir que cette histoire lui a valu un blâme et lui a coûté sa carrière », lance Stéphane Giroux, le président de la Fédération profession­nelle des journalist­es du Québec (FPJQ).

M. Gilbert a en effet confié au Journal avoir de la difficulté à obtenir des contrats depuis que la société Les Ponts Jacques-Cartier et Champlain inc. a déposé sa plainte contre lui.

Son histoire a d’ailleurs suscité une vague de sympathie sur les réseaux sociaux. Plus d’une cinquantai­ne de personnes ont commenté l’article publié la semaine dernière, félicitant M. Gilbert pour son geste.

CAS COMPLEXE

Pourtant, le cas est complexe, dit Me Donald Riendeau, directeur général de l’Institut de la confiance dans les organisati­ons.

« D’un côté, l’Ordre des ingénieurs voit un manquement au secret profession­nel et doit éviter que ça se reproduise, dit-il. De l’autre, l’ingénieur pensait peut-être sauver des vies avec son geste. »

Me Riendeau analyse qu’une personne qui se trouve dans ce genre de situation a trois choix : quitter l’entreprise, protester ou se taire. « M. Gilbert a décidé de protester, c’est courageux, mais risqué », dit l’avocat.

C’est pourquoi la FPJQ demande une loi protégeant les lanceurs d’alerte qui parlent aux médias. M. Giroux juge que le projet de loi 87 facilitant la divulgatio­n d’actes répréhensi­bles d’organismes est insuffisan­t à cet égard.

« La société a besoin des lanceurs d’alerte, mais s’ils craignent de tout perdre, ils ne parleront pas », dit-il.

L’OIQ n’a pas souhaité commenter cette affaire.

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