Le Journal de Montreal

Quatre nouvelles redoutable­s et sublimes

Prochain président d’honneur du Salon internatio­nal du livre de Québec, le talentueux Eric-Emmanuel Schmitt, élu en 2016 à l’Académie Goncourt, propose quatre sublimes « novelas » explorant toutes les palettes des émotions humaines dans son nouveau livre,

- MARIE-FRANCE BORNAIS

L’écrivain et dramaturge adoré des Québécois s’est laissé porter par l’idée d’explorer la question du pardon et de la vengeance dans ce projet superbemen­t accueilli en Europe dès sa sortie.

« Je voulais éclairer cette espèce de diamant à mille facettes qu’est le pardon. Forcément, dans nos vies, on est en situation de rencontrer le pardon puisque, quand on nous blesse, quand on nous agresse, quand on nous ment, on est en face de la problémati­que du pardon. On se dit : bon, est-ce que je pardonne ou est-ce que je me venge ? », commente-t-il avec toute la gentilless­e qu’on lui connaît.

« Pardon et vengeance sont toujours deux horizons de notre vie, lorsqu’on nous blesse. On connaît tous ça de façon intime. Ces deux termes ont l’air totalement opposés et moi, j’ai écrit le livre sous le titre La

vengeance du pardon parce que je voulais montrer qu’en fait, c’est un peu plus ambigu et paradoxal qu’on ne croit, parce que parfois, oui, effectivem­ent, peutêtre que la meilleure manière de se venger, c’est de pardonner parce qu’il est difficile de pardonner, mais il est difficile d’être pardonné. Et puis, pardonner à qui? Entre pardonner aux autres et se pardonner soi, il y a des tas de nuances. Grâce au fait qu’il y ait quatre histoires, je peux éclairer différemme­nt et parcourir ce thème du pardon. »

EFFICACITÉ

Quatre histoires d’une redoutable efficacité sont donc proposées aux lecteurs : Les soeurs Barbarin,

Mademoisel­le Butterfly, Dessine-moi un avion et La vengeance du pardon. Dans la première, deux soeurs jumelles s’aiment et se haïssent tout au long de leur vie. Mademoisel­le Butterfly met en scène un jeune homme cynique et une jeune fille candide et naïve.

La troisième histoire, La vengeance du pardon, parle d’une femme qui rend visite, en prison, au serial

killer qui a tué sa fille. Cette nouvelle l’a conduit hors de sa zone de confort. « Je descendais dans des zones où je n’étais jamais descendu, que ce soit pour rentrer dans cette mère qui va visiter l’assassin de sa fille ou pour rentrer dans le discours du serial killer, puisqu’elle essaie de trouver le moment, dans son enfance, où il est devenu inhumain, où tout a basculé. Moi, j’avançais, en empathie totale avec un assassin. C’était très troublant. »

Le recueil se termine « dans la lumière », ajoute-til, avec Dessine-moi un avion, où un homme dur et fermé se rend compte qu’il est sans doute le pilote qui a abattu l’avion de Saint-Exupéry. « On évoque quelque chose de terrible... mais il y a quand même une rédemption. »

RÉACTIONS TRÈS POSITIVES

Dès sa sortie, le livre a suscité des réactions très positives. « Rarement un de mes livres aura été aussi bien reçu, d’une façon unanime. Les gens adorent, sans réserve, parce qu’il y a des tas de couleurs différente­s dans ce livre. (...) Ce sont des nouvelles à chutes et c’est le bonheur spécifique de ce genre. C’est un art très spécial. »

L’écrivain a par ailleurs confirmé, en entrevue, sa présence à Québec le printemps prochain à titre de président d’honneur du Salon internatio­nal du livre de Québec. Il a tissé des liens très forts avec le Québec, où il vient plusieurs fois par an. « Maintenant, j’ai des repères, des lieux que j’aime passionném­ent, des amis. J’ai envie de faire des choses. Un jour, ça va se retrouver dans un livre, tout ça ! » » Eric-Emmanuel Schmitt a acheté le Théâtre Rive Gauche, à Paris, il y a cinq ans. L’adaptation théâtrale du Journal d’Anne Frank y a été présentée plus de 200 fois.

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PHOTO COURTOISIE, ROBERTO FRANKENBER­G

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