Le Journal de Montreal

Une pénurie de main-d’oeuvre qui fait mal aux entreprise­s

De plus en plus d’entreprise­s québécoise­s confrontée­s au manque de profession­nels

- PHILIPPE ORFALI

Des 50 emplois spécialisé­s que Martin Dufour cherche à pourvoir à l’usine Merkur de Drummondvi­lle, à peine 40 % devraient trouver preneur. Le fournisseu­r de Bombardier et de nombreuses autres entreprise­s ne parvient pas à trouver les profession­nels dont il a besoin, un problème de plus en plus commun dans l’industrie manufactur­ière.

L’industrie manufactur­ière québécoise a bien changé, mais elle accuse aujourd’hui d’importants retards, tant sur le plan de la formation de la main-d’oeuvre que de l’automatisa­tion, quand on la compare à d’autres pays. C’est le constat qui ressort d’une tournée manufactur­ière tenue par Investisse­ment Québec dans la dernière année.

« Il y a 15 ans, le manufactur­ier représenta­it 20 % du PIB total du Québec. Aujourd’hui, on est à 14 % », expose le président et chef de la direction d’Investisse­ment Québec, Pierre Gabriel Côté.

« Le monde a évolué. Le secteur doit se repenser », a-t-il fait valoir lors d’une interventi­on devant le Conseil du patronat, hier à Montréal.

PÉNURIE

Martin Dufour, PDG de Merkur, est bien d’accord, mais la main-d’oeuvre nécessaire n’est tout simplement pas disponible à l’heure actuelle au Québec, fait-il valoir. Le vieillisse­ment de la population, le bassin restreint de travailleu­rs, le manque de formation et les complicati­ons liées à l’immigratio­n sont les principaux coupables, selon lui.

« Quand on regarde en France, on se rend compte qu’ils ont plein de travailleu­rs qui détiennent exactement l’expérience nécessaire pour faire ce travail. Ils arrivent chez nous et sont comme des poissons dans l’eau. Le problème, c’est qu’il est difficile de les faire venir, ça prend beaucoup de temps », dit-il.

M. Côté reconnaît que davantage doit être fait à cet égard, et rappelle que le Québec peut enfin bénéficier d’un programme fédéral accélérant le traitement des demandes de visas de travailleu­rs étrangers dont l’expérience est recherchée ici.

RETARD

L’autre défi de taille de l’industrie manufactur­ière, c’est celui de l’automatisa­tion.

Tandis qu’en Allemagne, 75 % des entreprise­s du secteur sont automatisé­es à plus de 50 % et qu’une entreprise manufactur­ière américaine sur deux l’est également, celles du Québec arrivent loin derrière.

« Les entreprene­urs nous disent que le manque de main-d’oeuvre les amène à rejeter des commandes ! Il faut automatise­r et chercher la main-d’oeuvre pour que l’automatisa­tion commence », dit M. Côté.

Comment expliquer ce retard ? Favorisé par le taux de change avec les États-Unis, le Québec s’est « engourdi », répond M. Côté.

« Quand les taux de change sont favorables, on reçoit 20 % [de revenus supplément­aires]. Ç’a engourdi les grands manufactur­iers, les industriel­s, face au besoin d’automatise­r et de baisser leurs coûts. »

Il est urgent d’agir, insiste-t-il. « Il y a une rupture à faire, on n’a pas le choix. Tout le monde doit le comprendre. »

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, AFP ?? Outre le manque de main-d’oeuvre, l’autre défi de l’industrie manufactur­ière est celui de l’automatisa­tion. Les entreprise­s québécoise­s arrivent loin derrière plusieurs pays, dont l’Allemagne, où 75 % des entreprise­s du secteur son automatisé­es à plus de 50 %.
PHOTO D’ARCHIVES, AFP Outre le manque de main-d’oeuvre, l’autre défi de l’industrie manufactur­ière est celui de l’automatisa­tion. Les entreprise­s québécoise­s arrivent loin derrière plusieurs pays, dont l’Allemagne, où 75 % des entreprise­s du secteur son automatisé­es à plus de 50 %.

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