L’heure de vérité a sonné pour Justin Trudeau
Cet automne, le gouvernement libéral a devant lui un chemin miné avec d’épineux dossiers à régler
OTTAWA | L’heure de vérité a sonné pour le gouvernement Trudeau, qui risque de passer son temps à éteindre des feux politiques dès le retour des parlementaires la semaine prochaine, croient des experts. « Ce sera une session automnale pivot pour le gouvernement, prévoit le politologue André Lamoureux. C’est l’heure des redditions de compte. » Le menu législatif s’annonce chargé dès la rentrée parlementaire le 18 septembre prochain. Le projet de loi légalisant la marijuana vient rapidement en tête. Pour M. Lamoureux, il est clair avec le recul que les libéraux ont fait preuve d’improvisation dans ce dossier, comme le démontre la résistance de plusieurs provinces, dont le Québec.
« Il faudra corriger le tir, dit-il. On voit que cela a été fait avec beaucoup de bons sentiments et que les provinces sont maintenant prises avec le dossier. »
Le politologue de l’Université d’Ottawa François Rocher partage cette analyse.
À son avis, il y a fort à parier que les provinces ne « seront pas prêtes » avant l’échéance prévue du mois de juillet 2018.
Pour M. Rocher, les difficultés rencontrées par les libéraux dans ce dossier comme dans d’autres relèvent d’une mauvaise planification.
À l’avenir, le chercheur souhaite voir la troupe libérale offrir plus de « profondeur dans ses réflexions » au-delà de faire la promotion de « valeurs morales ».
LE TEST DE L’ALÉNA
Mais la renégociation de l’ALÉNA constitue le vrai « test » de la rentrée du gouvernement Trudeau, selon M. Lamoureux, un professeur à l’UQAM.
« Ce sera le test révélateur de stratégie des libéraux de ne pas trop bousculer, d’y aller poliment et avec délicatesse » face à l’administration Trump, dit-il.
Au Parlement, les débats autour de l’abolition des échappatoires fiscales utilisées par des propriétaires de PME pour payer moins d’impôt risquent de faire des flammèches.
Dans le coin droit, les conservateurs, qui y sont farouchement opposés (voir autre texte). Dans le coin gauche, les libéraux, qui semblent résolus à aller de l’avant avec la réforme.
« La joute verbale risque d’être intéressante à suivre », affirme M. Rocher.
GOUVERNEMENT INSTABLE
L’avancement de dossiers autochtones qui piétinent représente aussi une autre embûche à surmonter pour le gouvernement libéral qui a multiplié les promesses envers les Premières Nations.
Afin de donner un coup de barre, Justin Trudeau a récemment profité d’un remaniement ministériel pour affecter deux ministres à la tâche.
M. Lamoureux y voit un signe de « l’instabilité » d’un gouvernement qui doit maintenant rendre des comptes à mi-mandat.
La question des migrants va elle aussi à coup sûr rebondir à la Chambre des communes. Sans compter la situation internationale avec la Corée du Nord qui pourrait forcer Ottawa à réagir.
Pour le constitutionnaliste Benoit Pelletier, les dossiers chauds de la rentrée ont « évidemment » le potentiel de nuire au gouvernement Trudeau, mais pas outre mesure.
« Le parti est sur une erre d’aller avec la popularité personnelle de Justin Trudeau, croit M. Pelletier, un ancien ministre libéral québécois. Les libéraux ne devraient pas écoper de façon magistrale des enjeux des prochains mois. »
Au cabinet du premier ministre, on souligne que les « priorités demeurent les mêmes », soit « l’économie, les emplois, l’environnement et la réconciliation avec les autochtones ».