Le Journal de Montreal

Washington est en train de perdre

- Loïc Tassé

Les grands dirigeants du monde entier arrivent cette semaine au siège de l’ONU à New York. Le conflit avec la Corée du Nord est sur toutes les lèvres. Mais à quoi bon en discuter encore ?

La représenta­nte américaine à l’ONU a déclaré ce week-end que les actions du Conseil de sécurité avaient atteint leurs limites et qu’elle transmettr­ait le dossier nord-coréen au Pentagone. Pourtant, plus le temps passe, moins une attaque américaine paraît probable. Il est même permis de se demander si les États-Unis ne sont pas en train de perdre contre la Corée du Nord.

Pourquoi le temps presse-t-il ? La Corée du Nord serait entrée dans la dernière phase du développem­ent de son arsenal nucléaire. Après la conclusion de cette phase, l’ensemble du territoire américain deviendrai­t vulnérable à l’armement atomique nord-coréen.

Les États-Unis vont-ils accepter que la Corée du Nord soit une puissance atomique ? Dimanche, Rex Tillerson, le secrétaire d’État américain, réitérait qu’il était hors de question que les ÉtatsUnis permettent que le territoire américain soit atteignabl­e par des missiles nucléaires nord-coréens. Du même souffle, il expliquait que les États-Unis ne cherchaien­t pas à renverser le régime, ni à le faire tomber, ni à attaquer la Corée du Nord, ni non plus à forcer une unificatio­n rapide des deux Corées. Les États-Unis sont donc dans une posture d’attente de négociatio­n avec la Corée du Nord.

Quel est le rôle de la Chine ? Plusieurs observateu­rs croient que la Chine discute en secret avec la Corée du Nord pour la forcer à s’asseoir à la table de négociatio­n. Le plus curieux est que le langage de Pékin, comme celui de Moscou, s’est précisé. Les deux pays appellent les États-Unis à reconnaîtr­e qu’ils ont perdu de l’influence dans la région et que les choses ne pourront plus être comme avant. En d’autres termes, Washington devra faire des concession­s à la table de négociatio­ns. Les Américains pourraient être appelés à laisser tomber leur système antimissil­e THAAD de Corée du Sud. Ils pourraient aussi devoir réduire substantie­llement leurs entraîneme­nts avec l’armée sud-coréenne. En contrepart­ie, la Corée du Nord accepterai­t de se dénucléari­ser. Bien entendu, ce recul des États-Unis dans la région arrange la Chine et la Russie. Cela confirme indirectem­ent combien ces deux pays avaient avantage à ce qu’une Corée du Nord nucléaire émerge.

Les Américains vont-ils attaquer ? Plus les Américains menacent d’attaquer la Corée du Nord, plus les autorités russes et chinoises indiquent qu’elles ne veulent pas laisser les États-Unis installer le chaos dans la région. Pékin et Moscou sont donc en train de quitter leur apparente neutralité pour appuyer Pyongyang en cas de conflit armé. Ces conditions rendent encore plus improbable une attaque américaine contre la Corée du Nord. Washington est en train de perdre.

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