Le Journal de Montreal

Le CRTC nuit aux régions

- MARIO DUMONT mario.dumont@quebecorme­dia.com

Quelle ne fut pas ma surprise au cours des derniers jours d’apprendre que dans mon rôle d’animateur télé il y avait une nouvelle mesure du temps passé sur des sujets montréalai­s. M’informant sur cette procédure, j’ai compris que, depuis le 1er septembre, le CRTC impose un minimum d’heures de contenu local montréalai­s.

Vous avez bien lu. Le CRTC, le grand organisme réglementa­ire qui nous « protège », trouve que la télévision québécoise n’est pas assez montréalai­se. Je n’arrive pas à y croire. Chaque fois que je me promène en région, les gens de partout m’interpelle­nt pour me dire : « Ne nous oubliez pas, nous, les gens des régions ! Parlez de nos problèmes ! »

Je les comprends. Il existe une crainte naturelle que la télé ne devienne trop centralisé­e, donc trop centrée sur Montréal. Ce phénomène de centralisa­tion est naturel. Les sièges sociaux des médias sont à Montréal, la majorité des journalist­es et animateurs vivent dans la région de Montréal.

La métropole accueille beaucoup d’événements, de congrès, de grands lancements culturels. C’est aussi là que sont implantés les bureaux de beaucoup d’organismes qui participen­t au débat public et les sièges sociaux de la plupart des grandes entreprise­s.

TELLEMENT GRAND LE QUÉBEC

Il y a aussi la distance. Lorsque survient un événement, la couverture sera bien plus instantané­e s’il survient dans un rayon de cinq kilomètres de ce quartier montréalai­s qu’on appelle la cité des ondes que si le même événement se produit en milieu rural, loin de toutes les stations.

Dans un territoire immense comme celui du Québec, la distance met à risque la capacité de tous ceux qui sont loin de faire entendre leur voix. Je n’ai jamais croisé quelqu’un de la région de Montréal exprimant ce genre d’inquiétude­s ni demandant à un organisme comme le CRTC de les protéger.

Un gars du Bas-Saint-Laurent comme moi garde à l’esprit l’importance de parler de toutes les régions. Mais étant basé à Montréal, je sens quotidienn­ement cette tendance absolument naturelle qui mène à une montréalis­ation du contenu.

Comment les grands bonzes du CRTC peuvent-ils ignorer tout cela ? Leur prétention, c’est qu’il faut imposer du contenu local partout. Je comprends bien qu’un organisme réglementa­ire puisse vouloir protéger l’informatio­n locale en région. Il y a une logique à garantir aux gens de l’Abitibi ou de la Mauricie qu’ils auront des bulletins procurant un contenu émanant de leur région.

RÉGIONS FURIEUSES

Mais appliquer la même logique à une métropole tient du délire. Connaissez-vous un endroit dans le monde où la métropole est en danger de tomber dans l’oubli ? Croyez-vous sérieuseme­nt que Paris soit en danger de tomber dans l’oubli dans la télé française ?

La réputation du CRTC n’est pas excellente. À plusieurs reprises, cet organisme s’est montré en retard sur l’évolution rapide de l’industrie des télécommun­ications. Cette fois-ci, le CRTC se tire royalement dans le pied. Un incitatif réglementa­ire à la montréalis­ation des ondes va soulever une colère justifiée dans les régions.

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