Le Journal de Montreal

Le fédéral pourchasse la veuve d’un ancien employé d’Aveos

Le chômage réclame 4,5 millions $ aux ex-travailleu­rs de nouveau victimes d’Ottawa

- BORIS PROULX

OTTAWA | Une mère monoparent­ale d’un enfant autiste implore le gouverneme­nt fédéral de renoncer aux 10 000 $ réclamés à son conjoint, victime de la faillite d’Aveos avant de succomber à un cancer.

« J’aimerais que le gouverneme­nt nous lâche. Je trouve très injuste que ce soit les enfants qui aient à payer ce prix-là. Je vais devoir piger dans leur fonds d’étude, le petit peu que leur père leur a laissé par l’assurance vie », soupire Annie Bellemare, qui élève seule ses jumeaux de neuf ans, dont l’un est autiste.

Son conjoint et père de ses enfants, Érick Brosseau, est décédé en 2014 après une bataille contre le cancer du pancréas. Sa maladie s’est déclarée après qu’il a été mis à pied lors de la faillite en 2012 du centre de maintenanc­e d’avions Aveos à Montréal, un sous-traitant d’Air Canada. Plusieurs attribuent la faute de la fermeture au laxisme d’Ottawa.

REMBOURSER

C’est donc à Mme Bellemare que le gouverneme­nt réclame les 10 185 $ reçus en prestation­s d’assurance-emploi du disparu. Les ex-employés d’Aveos au chômage ont reçu une compensati­on d’Air Canada quelques mois après leur perte d’emploi. La Cour considère que 750 d’entre eux doivent conséquemm­ent rembourser quelque 4,5 M$ qu’ils ont reçus en prestation­s de chômage.

« Ça va peut-être m’empêcher de donner certains services à mon garçon autiste. Je suis monoparent­ale, donc j’ai besoin de beaucoup de gardiennag­e pour aller travailler. Ce n’est pas gratuit », indique la chef de famille de Coteau-du-Lac, en Montérégie.

Son dernier espoir est que le gouverneme­nt fasse preuve de compassion.

D’ex-employés d’Aveos ont demandé lundi au ministre de la Famille, des Enfants et du Développem­ent social, Jean-Yves Duclos, de faire annuler leur dette « injuste » auprès du Conseil du Trésor.

FAUTE AU FÉDÉRAL

« Je demande [au Conseil du Trésor] de mettre un pansement sur tout ce qu’ils ont fait dans le passé. La blessure sera encore là, mais au moins nous pourrions passer à autre chose », exprime Jean Poirier, représenta­nt des ex-employés d’Aveos.

Les anciens d’Aveos se sentent doublement victimes d’Ottawa, puisque c’est à cause du laisser-aller du fédéral que le centre d’entretien d’Air Canada est passé entre les mains de ce sous-traitant en 2011, un an avant la faillite.

Le transporte­ur était pourtant assujetti à la Loi sur la participat­ion publique d’Air Canada, qui obligeait notamment le maintien du centre d’entretien de Montréal.

« Le fédéral est complèteme­nt responsabl­e de leur sort pour ne pas avoir fait respecter la loi. Le minimum qu’il peut faire, c’est d’annuler la dette des anciens employés », indique le député de Mirabel, Simon Marcil, du Bloc québécois.

Il demandera aujourd’hui au ministre Duclos d’utiliser son pouvoir pour oublier cette créance, surtout que la caisse de l’assurance-emploi est en surplus de 1,4 G$.

« Le ministre comprend que des anciens employés d’Aveos se retrouvent dans une situation précaire et il veut s’assurer que chacun d’entre eux est traité équitablem­ent et avec compassion », s’est contenté d’indiquer le bureau du ministre libéral Jean-Yves Duclos.

Il n’aurait fait aucune promesse aux ex-employés d’Aveos.

 ?? PHOTO PIERRE-PAUL POULIN ?? Annie Bellemare élève seule ses jumeaux Noah et Christophe­r et doit payer plus de 10 000 $ au fédéral, responsabl­e selon elle de la fermeture d’Aveos, pour qui son défunt conjoint travaillai­t.
PHOTO PIERRE-PAUL POULIN Annie Bellemare élève seule ses jumeaux Noah et Christophe­r et doit payer plus de 10 000 $ au fédéral, responsabl­e selon elle de la fermeture d’Aveos, pour qui son défunt conjoint travaillai­t.

Newspapers in French

Newspapers from Canada