Le miel d’ici est le plus contaminé aux pesticides
Les trois quarts des produits de la planète sont touchés, y compris ceux du Québec
Le miel nord-américain, y compris le miel québécois, est le plus contaminé aux pesticides néonicotinoïdes au monde, d’après une analyse internationale qui s’inquiète des effets cumulatifs sur la santé.
Les néonicotinoïdes sont les pesticides les plus répandus au monde. Depuis quelques années, scientifiques et apiculteurs les accusent de décimer les colonies d’abeilles et de menacer la santé humaine.
On retrouve des traces de ces substances dans la plupart des fruits et légumes, mais aussi dans les céréales et dans l’eau.
ENQUÊTE INÉDITE
Jamais toutefois ces pesticides n’avaient été pistées dans le miel à une si grande échelle, soit 198 échantillons provenant de 80 pays, réparties sur tous les continents.
Les chercheurs suisses, qui ont mené l’enquête publiée dans la prestigieuse revue Science, ont constaté que 86 % des échantillons nord-américains sont contaminés, contre 57 % en Amérique du Sud et 79 % en Europe. Globalement, les trois quarts des miels de la planète sont touchés.
Les quatre échantillons québécois contiennent la trace de deux à quatre des cinq néonicotinoïdes testés. Le petit nombre d’échantillons au Québec n’est qu’informatif et appelle à une investigation locale de grande envergure.
PAS DANGEREUX
Se voulant rassurant, l’auteur principal de l’étude, Edward Mitchell, de l’Université de Neuchâtel, souligne que « selon les normes en vigueur, la très grande majorité des échantillons étudiés ne posent pas de souci pour la santé des consommateurs ».
Néanmoins, son équipe s’inquiète de l’exposition chronique et cumulative aux néonicotinoïdes. « Les aliments transformés sont particulièrement problématiques », souligne la biologiste Madeleine Chagnon, professeure associée à l’Université du Québec à Montréal.
Pour Louise HénaultÉthier, de la Fondation David Suzuki, cette recherche doit inciter l’Agence canadienne d’inspection des aliments à intégrer l’analyse des néonicotinoïdes dans ses protocoles.
AGRICULTURE
Alexandre Aebi, coauteur de l’étude et chercheur-apiculteur à l’Université de Neuchâtel, estime que le portrait nord-américain reflète les pratiques.
« Le miel est un reflet de l’environnement, car pour le produire, l’abeille échantillonne les plantes, l’eau et l’air qui l’entoure », ajoute Blaise Mulhauser, directeur du Jardin botanique de Neuchâtel et instigateur de la recherche.
Mme Chagnon ajoute que le climat nordique joue en faveur des pesticides.
« Au Canada, le froid ralentit tous les processus biologiques, y compris la dégradation des pesticides dans le sol », explique-t-elle.
Les pesticides appliqués au printemps s’ajoutent donc à ceux de l’année précédente, conservés dans le sol par le froid.
Les premières victimes sont les abeilles, car en plus d’être exposées à ces substances dans l’environnement, le miel contaminé qu’elles produisent est essentiel à leur alimentation.