Le Journal de Montreal

Une mémoire à toute épreuve

Debbie Savoy Morel a fait preuve de déterminat­ion durant sa carrière

- François-David Rouleau FDRouleauJ­DM fdavid.rouleau @quebecorme­dia.com

Piquée au vif par le golf dans un tournoi provincial à l’âge de 14 ans, Debbie Savoy Morel a toujours fait preuve de déterminat­ion. Récit.

L’histoire derrière les débuts de la profession­nelle de 64 ans installée au Mirage depuis 1997 est fascinante.

De sang irlandais, la femme semblait destinée à faire carrière dans le milieu du golf. Mais elle le doit en grande partie à son frère, Danny, excellent golfeur au tempéramen­t explosif sur les allées.

Savoy Morel a commencé à titiller la petite balle blanche sur le parcours de neuf trous de La Tuque quand elle était âgée de 13 ans. Dès l’année suivante, le profession­nel l’a incitée à prendre part à un tournoi.

Ce qui s’est produit à Cap-Rouge a été le début de sa longue histoire d’amour avec le sport qui a développé sa personnali­té et fait la femme qu’elle est aujourd’hui, respectueu­se, généreuse, attentionn­ée, travaillan­te et surtout très honnête.

« Quand Jean-Marie Laforge m’a demandé d’aller en tournoi, je lui ai aussitôt répondu que je ne cassais même pas le 100. J’avais 36 de handicap et il voulait que je prenne part à la compétitio­n, se souvient-elle, assise avec Le Journal dans son bureau à proximité de la boutique du prestigieu­x club de golf Le Mirage.

« Mes parents m’ont amenée au tournoi. C’est là que j’ai cassé le 100 pour la première fois de ma vie. Je me souviens du feeling, je l’avais tellement apprécié et j’étais tellement contente de l’avoir réussi. En plus c’était en tournoi, poursuit-elle en tenant le clou de l’histoire au bout des lèvres. J’avais gagné le tournoi selon mon score net. »

EN LARMES

Ce jour-là, Debbie avait joué 98. Elle était folle de joie. En regardant la table de prix attribués à chaque gagnant, elle avait enligné le sac de balles remis au vainqueur selon le score net.

Quand elle s’est avancée pour le réclamer, les responsabl­es lui ont plutôt remis une petite paire de bas jaunes, « avec des pompons jaunes » tient-elle à préciser en ricanant. Un prix de participat­ion ?

« Les responsabl­es du tournoi ne m’avaient pas crue. Pour eux, c’était impossible d’avoir gagné et d’avoir joué sous les 100 avec mon handicap de 36, relate celle qui, aujourd’hui, ne garde aucune amertume de cette histoire. Je suis revenue en larmes à La Tuque, parce que les gens ne m’avaient pas crue. »

JOUER COMME UNE PRO

Élevée par ses parents Jeanne et Danny en respectant les principes de franchise et d’honnêteté, c’était une véritable gifle. La golfeuse s’est donc aussitôt mise au boulot. Son objectif : prouver aux gens qu’elle avait réellement remis une carte de 98. Elle a demandé à Laforge, son entraîneur, de lui apprendre à jouer au golf comme une pro.

« Je me suis dit que les gens se souviendra­ient de moi, que j’allais leur prouver que je suis capable de jouer de bons scores. Deux ans plus tard, j’étais rendue sur l’équipe du Québec, souligne-t-elle avec fierté.

« Pour un jeune, une histoire pareille aurait pu être dévastatri­ce. Mais ce ne l’a pas été pour moi. J’ai travaillé et j’ai montré mon potentiel. Il faut croire que j’avais ça en moi. »

Cette force de caractère démontre pourquoi Debbie Savoy Morel a fait carrière dans un monde d’hommes. Non seulement a-t-elle participé à de grands évènements dans sa carrière amateur aux quatre coins de la province, de l’Amérique du Nord et de la planète, mais elle a fait sa place sur l’échiquier du golf québécois. Elle a en quelque sorte tracé la voie des femmes dans ce sport.

Au Mirage depuis 1997 après avoir enseigné les rudiments du sport à Céline Dion, elle est une véritable pionnière alors qu’elle est la première femme au Canada à avoir occupé le poste de profession­nelle en titre d’un complexe de 36 trous. Encore aujourd’hui, elle est dans une classe à part. À peine une poignée de femmes occupent des postes aussi élevés dans la hiérarchie « golfique ».

Toutes ses merveilleu­ses réalisatio­ns découlent d’un prix qui ne lui était pas destiné. Cinquante ans plus tard, cette « paire de bas jaunes à pompons », elle les a toujours bien en évidence pour lui rappeler tout le chemin parcouru vers Terrebonne.

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Debbie Savoy Morel est profession­nelle au club de golf Le Mirage à Terrebonne. PHOTO COURTOISIE JUDITH GAUTHIER
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