La langue, la culture et l’identité n’ont pas de prix
Des victimes de la rafle des années 60 déplorent les montants accordés
OTTAWA | Même s’ils toucheront un dédommagement maximal de 50 000 $ chacun, de nombreux Autochtones victimes de la rafle des années 60 jugent insuffisant le montant mis de l’avant par le fédéral.
« Honnêtement, ça devrait être davantage », a soutenu hier Jessica Riddle, une femme autochtone de 34 ans arrachée à sa mère dès la naissance par les services pour enfants. Elle a grandi en Nouvelle-Écosse, mais ses origines se trouvent à 6000 km de là, dans les Territoires du Nord-Ouest.
Mme Riddle fait partie des dizaines de milliers de victimes qui seront dédommagées dans le cadre d’un accord de principe de 800 millions $ annoncé hier par le fédéral.
« J’ai perdu ma langue, ma culture, mon identité... Je ne pourrai jamais retrouver cela », a ajouté la membre de la nation Déné rencontrée à Ottawa par l’Agence QMI. L’expérience a été si douloureuse qu’elle ne peut chiffrer un montant qui, à ses yeux, serait acceptable.
EXODE FORCÉ
Pour Priscilla Meeches, tirée des bras de sa mère deux jours après sa naissance et placée dans une famille chrétienne, les dégâts causés par son exode forcé ne peuvent être dédommagés financièrement.
« Je ne sais pas ce que ce montant peut faire. Pendant tant d’années, des gens de la communauté ont abusé de moi, m’ont intimidée pour la couleur de ma peau et mes origines », a exprimé la dame de 48 ans, de la nation Long Plain du Manitoba. « Rien ne compensera le traumatisme. »
Aux côtés de la ministre des Relations Couronne-Autochtones Carolyn Bennett lors de l’annonce, la chef Marcia Brown Martell n’a pas souhaité dire si le montant accordé aux plaignants était adéquat. « L’argent n’est qu’un instrument », a insisté celle qui a piloté un des plus gros recours collectifs contre le gouvernement.
« ENTENTE NÉGOCIÉE »
De son côté, le cabinet de la ministre rappelle qu’il s’agit « d’une entente négociée » et que « les demandeurs représentatifs l’ont acceptée ». L’accord de principe doit être officiellement entériné dans les mois à venir. Une fois cette étape franchie, le gouvernement ne sera toutefois pas au bout de ses peines.
L’entente de 800 millions $ n’inclut pas les poursuites de victimes ayant vécu des cas d’abus sexuels et il ne touche pas les Métis. Le ministère n’était pas en mesure d’estimer hier l’ampleur des dédommagements qui restent à venir.