ARGENT
L’entreprise Uber a annoncé qu’elle quittait le Québec dès le 14 octobre si le gouvernement maintient ses nouvelles exigences, qui sont incompatibles avec le modèle d’affaires de la multinationale, dit Uber. Pour l’instant, le lobby du taxi et les « anti-Uber » ont gagné.
Maintenant, une question se pose : est-ce que le départ éventuel d’Uber signifie l’abandon de l’idée de dédommager les chauffeurs de taxi pour la perte de valeur de leur permis ? Après tout, les deux semblaient liés, non ?
Dans le cadre d’un point de presse de l’ex-ministre des Transports, Laurent Lessard, Le Journal nous a appris que les contribuables québécois paieront plusieurs millions de dollars pour compenser l’industrie du taxi, dont la valeur des permis a chuté depuis l’arrivée d’Uber.
Le ministre a annoncé qu’il créera une table de travail chargée de lui faire des propositions, d’ici six mois, sur les formes que pourrait prendre cette compensation. Mais le ministre a déjà évoqué la possibilité de retirer ou de racheter l’équivalent de 300 permis.
CHUTE DE LA VALEUR DES PERMIS
Rappelons qu’en mars dernier, des représentants de l’industrie du taxi affirmaient que le projet pilote avec Uber avait fait chuter la valeur des permis de taxis.
« Pour les 10 000 travailleurs du taxi de l’île de Montréal, cela équivaut à une perte de 200 millions $. Le gouvernement du Québec doit nous dédommager rapidement pour cette perte ou mettre un terme à ce projet pilote », expliquait alors le président du Comité provincial de concertation et de développement de l’industrie du taxi (CPCDIT).
Est-ce que les contribuables vont sauver les fesses des chauffeurs de taxi (et de ceux qui les financent, notamment FinTaxi, société dont le commanditaire principal est le Fonds de solidarité du Québec) même si Uber quitte la province ?
Réponse de l’attaché de presse du ministère, à qui j’ai parlé : « Nous, on aimerait qu’Uber reste. Aussi, il y a d’autres compagnies qui pourraient arriver au Québec dans le futur. Donc, c’est important de continuer le travail de modernisation de l’industrie du taxi […] Ce qu’on a annoncé vendredi dernier, c’est la création d’une table à laquelle les représentants de l’industrie du taxi, le ministère des Finances et le ministère des Transports vont regarder les moyens d’accompagnement financier dont l’industrie a besoin. Certains ont parlé de rachat de permis, certains ont parlé de compensation, nous, on n’a pas voulu mettre de mots là-dessus, car ça peut prendre plusieurs formes […] Ce travail-là va se faire, peu importe la décision qu’Uber prendra. »
RIEN DE SURPRENANT
Bref, l’initiative de « moderniser » l’industrie du taxi, qui pourrait inclure un dédommagement ou une compensation pour la perte de valeur des permis, n’est pas liée directement à la concurrence d’Uber. Ça arrivera, même si Uber s’en va, et même si aucun autre concurrent ne vient bouleverser l’industrie d’ici là.
Le contribuable québécois va vraisemblablement payer pour aider « préventivement » et pour « moderniser » l’industrie du taxi, parce qu’elle ne va pas bien. Rien de surprenant, dans un Québec où les lobbys ont tendance à obtenir le beurre et l’argent du beurre.