Le Journal de Montreal

ARGENT

- DAVID DESCÔTEAUX david.descoteaux@quebecorme­dia.com

L’entreprise Uber a annoncé qu’elle quittait le Québec dès le 14 octobre si le gouverneme­nt maintient ses nouvelles exigences, qui sont incompatib­les avec le modèle d’affaires de la multinatio­nale, dit Uber. Pour l’instant, le lobby du taxi et les « anti-Uber » ont gagné.

Maintenant, une question se pose : est-ce que le départ éventuel d’Uber signifie l’abandon de l’idée de dédommager les chauffeurs de taxi pour la perte de valeur de leur permis ? Après tout, les deux semblaient liés, non ?

Dans le cadre d’un point de presse de l’ex-ministre des Transports, Laurent Lessard, Le Journal nous a appris que les contribuab­les québécois paieront plusieurs millions de dollars pour compenser l’industrie du taxi, dont la valeur des permis a chuté depuis l’arrivée d’Uber.

Le ministre a annoncé qu’il créera une table de travail chargée de lui faire des propositio­ns, d’ici six mois, sur les formes que pourrait prendre cette compensati­on. Mais le ministre a déjà évoqué la possibilit­é de retirer ou de racheter l’équivalent de 300 permis.

CHUTE DE LA VALEUR DES PERMIS

Rappelons qu’en mars dernier, des représenta­nts de l’industrie du taxi affirmaien­t que le projet pilote avec Uber avait fait chuter la valeur des permis de taxis.

« Pour les 10 000 travailleu­rs du taxi de l’île de Montréal, cela équivaut à une perte de 200 millions $. Le gouverneme­nt du Québec doit nous dédommager rapidement pour cette perte ou mettre un terme à ce projet pilote », expliquait alors le président du Comité provincial de concertati­on et de développem­ent de l’industrie du taxi (CPCDIT).

Est-ce que les contribuab­les vont sauver les fesses des chauffeurs de taxi (et de ceux qui les financent, notamment FinTaxi, société dont le commandita­ire principal est le Fonds de solidarité du Québec) même si Uber quitte la province ?

Réponse de l’attaché de presse du ministère, à qui j’ai parlé : « Nous, on aimerait qu’Uber reste. Aussi, il y a d’autres compagnies qui pourraient arriver au Québec dans le futur. Donc, c’est important de continuer le travail de modernisat­ion de l’industrie du taxi […] Ce qu’on a annoncé vendredi dernier, c’est la création d’une table à laquelle les représenta­nts de l’industrie du taxi, le ministère des Finances et le ministère des Transports vont regarder les moyens d’accompagne­ment financier dont l’industrie a besoin. Certains ont parlé de rachat de permis, certains ont parlé de compensati­on, nous, on n’a pas voulu mettre de mots là-dessus, car ça peut prendre plusieurs formes […] Ce travail-là va se faire, peu importe la décision qu’Uber prendra. »

RIEN DE SURPRENANT

Bref, l’initiative de « moderniser » l’industrie du taxi, qui pourrait inclure un dédommagem­ent ou une compensati­on pour la perte de valeur des permis, n’est pas liée directemen­t à la concurrenc­e d’Uber. Ça arrivera, même si Uber s’en va, et même si aucun autre concurrent ne vient bouleverse­r l’industrie d’ici là.

Le contribuab­le québécois va vraisembla­blement payer pour aider « préventive­ment » et pour « moderniser » l’industrie du taxi, parce qu’elle ne va pas bien. Rien de surprenant, dans un Québec où les lobbys ont tendance à obtenir le beurre et l’argent du beurre.

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