Le pape ira propager son message de paix en Birmanie
La crise des Rohingyas pourrait se retrouver au coeur de son discours historique
RANGOUN | (AFP) Attendu fin novembre en Birmanie, le pape François vient en émissaire de « paix », a assuré hier l’Église catholique, alors que sa défense des Rohingyas musulmans qui fuient en masse ce pays agité par un bouddhisme radical risque d’enflammer l’opinion publique birmane.
Le pape « vient pour le bien du pays et il parlera de la paix », a insisté le porte-parole de la Conférence des évêques catholiques de Birmanie, Mariano Soe Naing, interrogé après la publication par le Vatican du programme de la visite.
CONFLIT
« Nous ne savons pas encore de quoi il parlera et s’il évoquera la crise en État Rakhine », a précisé le prélat. Cette région de l’ouest de la Birmanie est au coeur du conflit entre rebelles rohingyas et armée, qui a conduit depuis fin août à la fuite de plus d’un demi-million de civils rohingyas au Bangladesh voisin.
Le pape, qui n’a pas hésité à parler publiquement de « la persécution de la minorité religieuse de nos frères rohingyas », débutera sa visite par une rencontre avec la Prix Nobel de la paix et de facto chef du gouvernement Aung San Suu Kyi à Naypyidaw, la capitale administrative, le 28 novembre.
La dirigeante est critiquée à l’étranger pour son silence sur le rôle dans cette crise de l’armée, qui reste incontournable sur le plan politique.
VISITE HISTORIQUE
En Birmanie, pays à 90 % bouddhiste et où les chrétiens représentent environ 1 % de la population, cette visite historique du pape suscite toutefois un certain enthousiasme. Quelque 200 000 personnes sont attendues à la messe du 29 novembre à Rangoun, la capitale économique.
« C’est la première fois qu’un pape vient en Birmanie, il est célèbre alors j’irai le voir », réagit Pani, chauffeur de taxi à Rangoun interrogé hier.
« Les chrétiens et les bouddhistes, nous sommes pareils, nous sommes pacifiques, pas comme les musulmans », ajoute ce bouddhiste.
Le pape doit ensuite se rendre le 30 novembre au Bangladesh, après une dernière messe à Rangoun devant des jeunes.
PAS LE BIENVENU ?
« Nous sommes un pays bouddhiste donc je ne comprends pas pourquoi le pape vient », a réagi Maung Thway Chon, fondateur du nouveau parti nationaliste du pays. « Il ne connaît rien à la Birmanie et les gens sont très énervés de voir qu’il défend les Bengalis », ajoute-t-il, utilisant un terme péjoratif pour évoquer les Rohingyas.
Aung San Suu Kyi, déjà reçue par le pape François au Vatican, est critiquée à l’étranger pour son manque d’empathie envers les Rohingyas, considérés comme une des minorités les plus persécutées au monde, dans ce pays marqué par un fort nationalisme bouddhiste véhiculant une rhétorique anti-musulmane.
« Il y a eu beaucoup de critiques contre notre pays. Nous devons comprendre l’opinion internationale », a-t-elle déclaré hier soir dans un discours télévisé, ajoutant que le pays devait s’« attaquer aux problèmes. »