Le Journal de Montreal

Pas de casier pour avoir agressé Philippe Couillard

C’était une attaque contre la démocratie, dit le juge

- MICHAËL NGUYEN

Le jeune transgenre qui avait lancé un objet au premier ministre Philipe Couillard lors d’un rassemblem­ent de la communauté LGBT s’en est sorti sans casier judiciaire, hier.

« Un casier judiciaire ne ferait qu’amplifier ses difficulté­s sans rien apporter de plus à la collectivi­té », a commenté le juge Daniel Bédard.

Esteban Torres Wicttorff, 21 ans, avait agressé le premier ministre en juin 2016, quelques jours après la tuerie dans un club gai à Orlando qui avait fait 50 morts, dont l’assaillant. Des personnali­tés s’étaient exprimées, dont le premier ministre du Québec.

Quand ce dernier avait mentionné que Montréal était une ville inclusive, Torres Wicttorff s’est mis en colère et a lancé un objet en direction du premier ministre. L’accusé jure qu’il s’agit d’une boulette de papier, mais la police n’a pas été en mesure de corroborer cette version.

« Tout désaccord avec la vision d’une personne élue ne peut pas se traduire par des voies de fait […] tout simplement parce que cette façon de réagir n’est pas acceptable aux yeux de la population canadienne », a commenté le magistrat.

DÉMOCRATIE

Le juge a d’ailleurs noté que l’agression, même si elle n’a eu aucune conséquenc­e physique sur le chef du gouverneme­nt, avait été commise dans un contexte politique. « Si elle constitue, comme le soutient la poursuite, une atteinte directe à la démocratie, cette atteinte n’est pas d’une ampleur […] qui ébranle ou met en péril la stabilité du régime politique en place », a expliqué le juge.

Le geste de Torres Wicttorff reste néanmoins « humiliant et dégradant » pour la personne qui l’a subi, a-t-il ajouté.

« Une personne élue par une majorité des citoyens doit pouvoir s’exprimer sur la place publique sans aucune entrave de nature criminelle, a expliqué le juge. D’autant plus lorsqu’il s’agit du premier ministre, la première personne parmi les élus. »

CONDITIONS

Torres Wicttorff a obtenu l’absolution conditionn­elle. Cela signifie que pour éviter un casier criminel, il devra respecter plusieurs conditions.

Pendant 18 mois, le jeune transgenre devra respecter une probation lui interdisan­t entre autres de participer à tout rassemblem­ent « qui vise à dénoncer, revendique­r ou protester ».

Il devra effectuer 100 heures de travaux communauta­ires et présenter, si son agent de probation le lui demande, une preuve de suivi médical concernant son trouble de déficit de l’attention.

Hier, Torres Wicttorff n’a pas souhaité commenter. Une fois qu’il aura terminé sa probation, il devra attendre trois ans afin que le dossier soit effacé.

« Il ne s’agit nullement d’effacer ce que l’accusé a fait, du moins pas pour les trois prochaines années », a conclu le juge.

Me Arij Riahi de la défense réclamait une absolution inconditio­nnelle, tandis que la procureure de la Couronne, Amélie Rivard, suggérait un sursis.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Esteban Torres Wicttorff avait rapidement été maîtrisé par les autorités lorsqu’il a lancé un petit objet sur le premier ministre, lors d’un rassemblem­ent en juin 2016.
PHOTO D’ARCHIVES Esteban Torres Wicttorff avait rapidement été maîtrisé par les autorités lorsqu’il a lancé un petit objet sur le premier ministre, lors d’un rassemblem­ent en juin 2016.

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