Fausse joie pour un entrepreneur acquitté
La cour ordonne un nouveau procès pour fraude fiscale à Francesco Bruno
L’entrepreneur montréalais Francesco Bruno, qui avait profité de son acquittement pour intenter une poursuite massue de 45 millions $ contre les agences canadienne et québécoise du Revenu, devra finalement subir un nouveau procès pour fraude fiscale.
La Cour supérieure vient de statuer que la juge Dominique Larochelle a « commis plusieurs erreurs de droit », en 2015, lorsqu’elle a déclaré que la preuve à l’encontre du président de B.T. Céramique avait été amassée illégalement et qu’elle devait être exclue.
En donnant raison à l’appel logé par la Couronne fédérale le 6 octobre, le juge Daniel Payette a ainsi annulé l’acquittement de Francesco Bruno, de sa firme et de son vice-président, Rodolfo Palmerino, en ordonnant la tenue d’un nouveau procès.
Un an après son acquittement, Frank Bruno réclamait pas moins de 45 millions $ en dédommagement au fisc dans une poursuite civile où il accusait les vérificateurs d’avoir utilisé « à mauvais escient leurs pouvoirs » en bafouant ses droits.
L’homme d’affaires Tony Accurso est également en attente de procès dans cette vaste enquête qui, en tout, a conduit au dépôt de plus de 1000 chefs d’accusation de fraude contre des entrepreneurs et des firmes de construction, en plus d’amener huit anciens fonctionnaires de Revenu Canada en cour pour corruption.
CORRUPTION INTERNE
Dans leur enquête interne, les autorités du Revenu s’étaient rendu compte que certains de ses fonctionnaires avaient profité de la générosité de Francesco Bruno à l’époque où sa firme avait fait l’objet de vérifications fiscales.
Elles ont notamment saisi des documents et des photos montrant l’entrepreneur en compagnie d’au moins deux fonctionnaires du fisc dans une loge du Centre Bell ou en voyage à Las Vegas et aux Bahamas, avait révélé Le Journal en 2012.
Un autre fonctionnaire avait aussi bénéficié de travaux non facturés d’une valeur de 3600 $ réalisés dans sa résidence par la firme B.T. Céramique.
MENACES
En 2012, devant la commission Charbonneau, un entrepreneur de la région de Québec, Martin Carrier, avait également raconté qu’il avait reçu des menaces de la mafia italienne en tentant de décrocher à Montréal un contrat public qui était convoité par la firme de M. Bruno.
D’ailleurs, les inspections effectuées par Revenu Canada dans toute cette affaire tirent leur origine du projet d’enquête antimafia Colisée de la GRC, a rappelé le juge Payette.
Dans l’opération Colisée, les policiers fédéraux ont notamment filmé plusieurs entrepreneurs — mais pas Frank Bruno — apportant des liasses d’argent au quartier général du clan Rizzuto.