DES RITES FUNÉRAIRES EN TRANSFORMATION
La mort, et tout ce qui l’entoure, est vécue différemment selon les cultures, les époques et les mentalités. Au cours des dernières décennies, les rites et les cérémonies funéraires se sont transformés au Québec, témoignant de nouvelles réalités et de changements de sensibilités.
À une certaine époque, la mort d’une personne était entourée de tout un décorum social et religieux. Le corps était souvent embaumé, exposé dans un cercueil et mis en terre dans un cimetière au cours d’une cérémonie religieuse. Aujourd’hui, cette tradition tend à s’estomper.
« L’augmentation du taux de crémation est le phénomène le plus marqué de cette transformation, souligne Alain Leclerc, directeur général de la Fédération des coopératives funéraires du Québec (FCFQ). Le taux actuel de crémation est d’environ 70 %. La demande d’embaumement diminue tout comme le nombre de jours d’exposition des corps. On remarque également une forte concentration des funérailles le samedi. Les funérailles en pleine semaine sont de plus en plus rares, notamment à cause des familles recomposées, pour qui ce n’est pas facile de réunir tout le monde en même temps, au même endroit. »
PERSONNALISATION DES RITUELS
Les entreprises funéraires sont forcées de s’adapter aux nouvelles demandes de rituels. Les gens se créent ainsi des rites en accord avec leurs valeurs (écologiques ou spirituelles, par exemple). Ainsi, plusieurs personnes choisissent de disperser les cendres du défunt dans la nature.
Luce Des Aulniers, anthropologue à l’UQAM, soulève une réflexion dans cette mouvance des rites. « Les décisions entourant la mort d’une personne sont davantage axées sur le côté pratique. On souhaite que la disposition des corps soit propre et rapide. La crémation et l’aquamation sont en ce sens très efficaces, mais je me demande comment elles s’articulent autour des croyances et des valeurs collectives, puisque les cérémonies funéraires mettent en scène ces rituels personnalisés où l’hommage à l’individu devient le but. Un des enjeux actuels est donc de réfléchir à l’importance d’un lieu où les restes sont regroupés. Si l’on veut que les vivants aient une relation saine avec les morts, c’est essentiel qu’ils puissent les visiter, mais aussi qu’ils sachent que la mort existe grâce au cimetière et au columbarium, qui sont des emblèmes signalétiques de la mort. C’est plus évocateur de faire un rite funéraire ou de mémoire quand il y a une trace matérielle de la dépouille. »
UNE NOUVELLE MÉTHODE
Après l’enterrement et la crémation, une nouvelle méthode de disposition des dépouilles fait son entrée en scène : l’aquamation. Si la crémation consume le corps par le feu, l’aquamation, comme son nom l’indique, utilise l’eau. Deviendra-t-elle aussi populaire que l’enterrement traditionnel en cercueil et que la crémation? « Aux États-Unis, où l’aquamation est davantage pratiquée, explique monsieur Leclerc, on remarque qu’elle attire deux types de clientèles : celle qui s’intéresse aux questions écologiques — puisque l’aquamation aurait moins d’impact sur l’environnement que les fours crématoires — et celle qui n’est pas à l’aise avec l’idée de brûler le corps d’un défunt. »