La Catalogne déclare son indépendance, l’Espagne refuse
Madrid a aussitôt réagi en mettant la région espagnole sous tutelle et en destituant le Parlement régional
BARCELONE | (AFP) Madrid a mis la Catalogne sous tutelle hier, destituant son exécutif et son Parlement quelques heures après sa déclaration d’indépendance.
Le gouvernement espagnol a tranché face au défi inédit posé par cette région grande comme la Belgique où vivent 16 % des Espagnols. À l’issue d’un conseil des ministres extraordinaire, le premier ministre Mariano Rajoy a annoncé une batterie de mesures draconiennes, dont la destitution du président séparatiste catalan Carles Puigdemont, de son cabinet et du directeur de la police de Catalogne.
Évoquant une « indépendance déchirante, triste et angoissante », M. Rajoy a aussi annoncé la dissolution immédiate du Parlement catalan, en vue de la tenue d’élections le 21 décembre pour surmonter la pire crise depuis le retour de l’Espagne à la démocratie il y a 40 ans.
« Le gouvernement a adopté ces mesures pour éviter la prise en otage inadmissible d’une majorité des Catalans et le vol d’une partie du territoire au reste des Espagnols », a-t-il expliqué.
Son annonce a été accueillie par les huées des milliers d’indépendantistes massés à Barcelone pour fêter leur « République ». Ils étaient également des milliers rassemblés dans d’autres villes catalanes comme Gérone et Tarragone.
PEU DE SOUTIEN INTERNATIONAL
Certains ont sablé du cava (mousseux) catalan, d’autres ont brûlé des pièces d’identité espagnoles.
Signe de l’inquiétude suscitée par cette crise en Europe, le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, a souligné que l’UE n’avait « bas besoin d’autres fissures ». Washington, Londres, Berlin et Paris tout comme l’OTAN et l’ONU ont également fait savoir qu’ils soutenaient l’unité de l’Espagne.
Alors qu’une bonne moitié des Catalans sont opposés à la déclaration d’indépendance, la maire de Barcelone, Ada Colau, a jugé que les indépendantistes au pouvoir avaient « avancé à une vitesse de kamikaze » imposée par des « intérêts partisans ».
Lors des dernières régionales en 2015, les indépendantistes avaient obtenu 47,8 % des suffrages.
Symbole de cette fracture, la résolution déclarant l’indépendance a été adoptée en l’absence de l’opposition – qui avait quitté l’hémicycle – par 70 voix pour, 10 voix contre et 2 abstentions.
« Ce papier que vous avez rédigé détruit ce qu’il y a de plus sacré, la coexistence » en Catalogne, avait auparavant déclaré en brandissant la résolution qui allait être votée Carlos Carrizosa, élu du parti anti-indépendantiste Ciudadanos.
Le texte proclame « la République catalane comme État indépendant et souverain, de droit, démocratique et social ».
Une heure après son adoption, le Sénat espagnol a validé le déclenchement de l’article 155 de la Constitution, permettant une mise sous tutelle de la région, un événement sans précédent en Espagne depuis le retour de la démocratie en 1977.
Dans la foulée, Mariano Rajoy a convoqué un Conseil des ministres extraordinaire pour mettre en oeuvre les mesures annoncées. La convocation aussi rapide d’élections n’était pas attendue, soulevant la question de la participation ou non des indépendantistes à ce scrutin.