Ketchup et papier de toilette sur les voitures des arbitres
Un documentaire présente les dérives de certains parents, coachs et spectateurs
ROUYN-NORANDA | Se faire insulter, violenter ou briser sa voiture, tout ça pour un salaire de misère. Le métier d’arbitre au hockey pourrait bien être l’un des pires au Québec.
Le documentaire Arbitres, diffusé en première mondiale hier au Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue, présente les dérives de certains parents, entraîneurs et spectateurs à l’endroit des 5000 officiels qui travaillent dans les arénas du Québec. Et les cas sont nombreux.
« POURRI ! »
Après un match de la Ligue nord-américaine de hockey, Benoit Lessard et ses collègues ont découvert leur véhicule plein de ketchup et enrubanné de papier de toilette avec l’inscription : « Pourri ! »
Ils ont préféré en rire en se prenant en photo devant le véhicule. « Laval et Sorel sont pas mal les deux pires villes où arbitrer. [...] Il me semble que j’aurais été bien avec ma blonde sur le bord du feu à la maison », raconte dans le film M. Lessard, qui continue par passion.
Le réalisateur Danic Champoux et le scénariste Mathias Brunet ont voulu démontrer que, dans les arénas, plusieurs personnes habituellement calmes peuvent perdre le contrôle.
Arbitre depuis plusieurs années, Michel Lafleur en sait quelque chose. Il raconte qu’un entraîneur de niveau pee-wee A a déjà tenté de l’écraser avec sa voiture dans le stationnement de l’aréna après un match. Il a également reçu trois coups de poing après un match midget. Il lui est d’ailleurs arrivé de poursuivre un parent pour menace de mort.
« Il y a beaucoup de blessures narcissiques de l’enfance non résolues chez certains parents », a dit M. Brunet, qui admet s’être lui-même souvent emporté verbalement contre des arbitres.
PAS PAYANT
Anthony Néron, 17 ans, est arbitre depuis deux ans et dit avoir eu la piqûre. Mainte- nant, lorsqu’il regarde une partie à la télé, il observe surtout le travail des officiels.
Il ignore cependant s’il continuera à arbitrer, puisque l’attitude de certains parents le dérange.
Il raconte qu’un entraîneur l’a déjà attendu à la sortie d’un aréna pour lui faire un mauvais parti.
Le cas d’Anthony Néron illustre parfaitement la pénurie d’arbitres partout au Québec. Après quelques années à se faire crier des insultes, les jeunes abandonnent.
« Ce n’est vraiment pas payant pour toute la charge de travail que ça demande. L’officiel doit gérer le match, les entraîneurs et, souvent, les parents », a raconté après la projection Patrick Morin, qui arbitre dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec.
Un officiel est payé environ 15 $ par partie, mais il doit acheter son équipement au coût d’environ 300 $.