Le Journal de Montreal

Du 100 mètres à la vie politique

- Pierre Durocher PDurocherJ­DM

À la retraite depuis 2010, le Lavallois Nicolas Macrozonar­is détient toujours le cinquième meilleur temps de l’histoire des sprinteurs canadiens, lui qui avait couru 100 mètres en 10,03 secondes en 2003, lors d’une compétitio­n internatio­nale tenue à Mexico.

Maintenant âgé de 37 ans, Macrozonar­is est engagé dans un tout autre genre de sprint, soit celui de convaincre les électeurs du quartier Sainte-Dorothée, à Laval, de voter pour lui lors des élections municipale­s le 5 novembre.

Quarante jours avant la tenue de ces élections, Macrozonar­is a choisi de représente­r le parti Action Laval, dirigé par Jean-Claude Gobé. Ça ne lui procure pas beaucoup de temps pour agir, mais il n’en est pas à son premier défi dans la vie.

Le Journal de Montréal a rencontré l’ancien athlète olympien au bureau du parti sur le boulevard Saint-Martin.

Quelques jours avant l’entretien, Macrozonar­is avait fini d’installer ses affiches électorale­s à diverses intersecti­ons du quartier Sainte-Dorothée.

Muni d’un escabeau, l’ancien coureur (et entraîneur de son propre club d’athlétisme au Centre Claude-Robillard) a dû faire vite pour dénicher les meilleurs endroits pour placer ses pancartes, car les partis sont nombreux à briguer les suffrages à Laval.

UNE COMPÉTITIO­N BIEN DIFFÉRENTE

« Je perçois ces élections comme une sorte de compétitio­n, confie Macrozonar­is en souriant. Il faut faire vite pour rejoindre la population, pour se faire connaître. Heureuseme­nt que c’est un quartier où je me sens à l’aise, étant donné que j’ai grandi sur la rue Bord de l’eau et que je reçois beaucoup d’aide de la part de gens qui tiennent à ce que je réussisse. »

Parmi ceux qui lui donnent un coup de main, il y a ses propres athlètes du club Finalpush à Montréal.

« Huit d’entre eux sont venus distribuer des dépliants aux portes des demeures du quartier. Je ne dispose pas d’un gros budget et toute aide est fort appréciée », précise-t-il.

Vu que ce sont des sprinteurs, ces jeunes se sont chargés rapidement de la distributi­on ! Les jours de week-end, Macrozonar­is se présente lui-même aux portes des résidents, ou encore il se poste à la sortie des marchés d’alimentati­on pour communique­r son message aux citoyens, vêtu d’un survêtemen­t aux couleurs de l’équipe canadienne.

Pourquoi as-tu choisi de t’embarquer dans cette aventure en politique ?

« La transition n’est pas facile pour les athlètes d’élite. Une fois que ma carrière a pris fin en 2010, je me suis cherché une occupation. Un ami m’a conseillé de m’impliquer au Centre communauta­ire du Sablon, à Laval, afin d’aider cet organisme sur le plan des programmes sportifs, entre autres choses. J’ai offert mes services comme bénévole. Quatre mois plus tard, je faisais partie du conseil d’administra­tion et, en 2013, j’ai été choisi à titre de bénévole de l’année à Laval, après avoir effectué une collecte de fonds aux retombées positives pour des gens à mobilité réduite. En m’impliquant dans la communauté lavalloise, j’ai fait la connaissan­ce de Jean-Claude Gobé. Lorsqu’il m’a demandé si j’étais intéressé à joindre son équipe, j’ai accepté. J’ai couru durant une bonne partie de ma vie. Maintenant, je suis prêt à courir pour les citoyens de Sainte-Dorothée. Mon slogan est d’ailleurs “Je cours pour vous”. »

Si tu parviens à te faire élire, qu’aimerais-tu apporter à la communauté lavalloise ?

« Le sport a eu un impact positif dans ma vie. Je n’ai pas grandi dans une famille riche. Mes parents ont divorcé alors que j’étais adolescent et j’ai habité dans un petit appartemen­t avec mon frère. J’ai déjà dû échanger des Pétro-Points pour m’offrir un sandwich dans un dépanneur. Mes débuts en athlétisme n’ont donc pas été faciles. J’aimerais offrir aux jeunes Lavallois de meilleures possibilit­és pour pratiquer différents sports. Ça m’attriste de voir que la piste d’athlétisme où je courais à l’époque, sur le boulevard La Concorde dans l’est de Laval, n’est plus praticable, ayant été laissée à l’abandon. Il faut trouver une façon d’améliorer les installati­ons sportives à Laval. Je crois que je peux avoir un impact sur les jeunes en faisant la promotion du sport. Il faut notamment améliorer l’accès à nos différents parcs. Ma vision est celle d’une ville active. »

Crois-tu en tes chances d’être élu le 5 novembre au soir ?

« Je le souhaite de tout coeur, mais c’est difficile de qualifier mes chances de gagner pour le moment. C’est un domaine tout nouveau pour moi. Si j’ai accepté de me joindre

au parti de Jean-Claude Gobé, c’est parce que j’aime sa façon de penser. Il est une véritable encyclopéd­ie en politique. »

Peux-tu nous parler du club d’athlétisme Finalpush que tu as fondé en 2014 et qui fonctionne très bien ?

« J’en suis pas mal fier. Je sais ce que peuvent vivre les athlètes, et ça représente un atout pour moi. J’adore l’athlétisme et, une fois à la retraite, j’ai offert mes services à quelques clubs, sans succès. J’ai alors décidé de fonder mon propre club d’athlétisme, affilié à la Fédération québécoise. Je suis parti de zéro et, aujourd’hui, je conseille, dans un rôle d’entraîneur, une soixantain­e d’athlètes, dont Praise Omogbai, couronnée championne canadienne au 100 mètres dans la catégorie cadet (14 ans), et Joe Bernard Ezzedine, médaillé d’argent dans cette épreuve dans le même groupe d’âge. Mon programme fonctionne super bien. Je veux aider les jeunes à prendre de bonnes décisions dans la vie. Le plus difficile pour moi sera de gérer la croissance du club. »

En plus de ton club d’athlétisme, dans quoi es-tu impliqué ?

« À la fin de ma carrière, je suis retourné à l’école pour devenir thérapeute sportif. Je fais partie de l’Associatio­n canadienne des thérapeute­s en médecine douce. C’est mon principal gagne-pain, même si l’athlétisme demeure ma passion. »

Tu as pris part aux Jeux olympiques de Sydney en 2000, à l’âge de 19 ans, ainsi qu’à ceux d’Athènes, quatre ans plus tard. Que retiens-tu de tes années sur la scène internatio­nale de l’athlétisme ?

« J’étais déterminé à réussir une belle carrière, à l’instar de mon bon ami Bruny Surin. J’ai réalisé une marque personnell­e de 10,03 secondes lors d’une compétitio­n internatio­nale disputée à Mexico en 2003, devançant le détenteur du record mondial, Tim Montgomery, par un centième de seconde. J’ai alors commencé à toucher de belles sommes d’argent en pratiquant mon sport, notamment grâce à une entente avec la compagnie Reebok. À 22 ans, j’ai fait l’achat d’un condominiu­m à Laval, que j’habite toujours. Je n’étais toutefois pas prêt à gérer tout cela. Je manquais de bons guides et j’avais une attitude plutôt rebelle, ce qui m’a valu des accrochage­s avec certains entraîneur­s. J’ai eu des différends avec Glenroy Gilbert aux championna­ts du monde de 2003. C’est une longue histoire, mais j’avais raison de contester ses décisions. J’admets avoir changé de clubs trop souvent durant ma carrière. Ça m’a nui. C’est certain qu’il y a des choses que je ferais différemme­nt aujourd’hui, avec l’expérience acquise depuis. Je regarde aller un jeune sprinteur comme Andre De Grasse et il est très bien encadré. Il est fort talentueux et ses exploits aux Jeux olympiques sont une excellente chose pour l’essor de l’athlétisme au Canada. »

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PHOTOS PIERRE DUROCHER, DE COURTOISIE ET D’ARCHIVES 1. Nicolas Macrozonar­is, ancien champion canadien du 100 mètres, est engagé dans un autre genre de sprint comme candidat aux élections municipale­s, dans le quartier Sainte-Dorothée, à Laval. 2. Macrozonar­is connaît de beaux succès avec le club...

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