Le Journal de Montreal

Les confidence­s de Marcel

- MARIE-FRANCE BORNAIS Le Journal de Québec

Dans son nouveau roman, Le peintre d’aqua

relles, l’écrivain Michel Tremblay aborde le thème de la vieillesse par le biais de Marcel, un personnage atteint de schizophré­nie dont on n’avait pas entendu parler depuis presque 30 ans.

Michel Tremblay explique, en entrevue, avoir souvent écrit à la première personne, mais pense bien que c’est la première fois qu’il écrit un vrai journal, au jour le jour. « Je voulais parler de la vieillesse et du vieillisse­ment et il y a tellement de belles choses qui ont été écrites que j’avais un petit peu de misère à me trouver un personnage. Je ne savais pas comment aborder ça. »

Alors qu’il se questionna­it sur le sujet, son éditeur chez Leméac, Pierre Filion, lui a demandé un jour, à brûle-pourpoint, ce que Marcel était devenu, ajoutant qu’il l’avait abandonné depuis 30 ans. « J’ai dit : ah, mon Dieu, merci beaucoup ! » « À la fin du sixième volume des Chroniques du

Plateau-Mont-Royal, sa mère le place dans un asile. C’était en 1989 et je n’en avais jamais reparlé depuis. Il était disparu et on ne l’avait pas revu. On l’a vu venir au monde dans La Diaspora des Desrosiers, on l’a vu vieillir dans les Chroniques, et là on le retrouve vers la fin de sa vie, à 76 ans. »

VIEILLESSE ET SCHIZOPHRÉ­NIE

Ce roman lui a permis de parler de vieillesse à travers la tête d’un schizophrè­ne, même si la maladie n’est jamais nommée comme telle. Et la fin du livre – brillante – réserve d’ailleurs une grosse surprise aux lecteurs.

« Se mettre à l’intérieur de quelqu’un qui est différent, qui imagine des affaires, qui pense par exemple qu’il devient transparen­t quand il met ses lunettes fumées, c’est passionnan­t à faire. »

Les secrets douloureux que Marcel révèle au fil des pages et ses « visions » lui ont demandé beaucoup de travail. « Ça m’a pris un mois de plus que d’habitude parce que c’était des sujets très délicats et difficiles à écrire : comment bien doser tout cela ? Pour écrire la conversati­on qu’il a avec son chat sur le quai, par exemple, il ne fallait pas que ce soit ridicule, il ne fallait pas que ce soit comique, il fallait que ce soit touchant et qu’on croie à la présence du chat même s’il n’est pas là. C’était un livre difficile à écrire... mais passionnan­t. »

Michel Tremblay souhaitait aussi aborder le difficile passage de Marcel à l’asile sans sombrer dans le misérabili­sme ni dans le sensationn­alisme.

« Je marchais sur les oeufs... mais j’aimais bien ça ! »

POUR S’ÉVADER DU TRAVAIL

Marcel s’exprime par l’aquarelle – un trait inspiré de la propre vie de Michel Tremblay. « Je fais de l’aquarelle depuis 25 ans parce que c’est la seule chose qui me sort de mon travail. Peut-être parce que ce n’est pas un talent naturel que j’ai – ça me demande une telle concentrat­ion que ça me sort complèteme­nt de mon travail. » C’est d’ailleurs lui qui signe la couverture du livre.

Michel Tremblay repartira pour Key West, en Floride, à la fin du mois de novembre.

« Pour la première fois depuis 20 ans, j’ai envie de me reposer. Alors je vais aller m’effouarer à côté de ma piscine, lire et manger avec mes amis. Je vais avoir du fun, me promener, aller voir les couchers de soleil. Je pense que j’ai écrit 18 romans en 18 ans... alors je pense que j’ai mérité une année de congé ! »

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Michel Tremblay Le peintre d’aquarelles Éditions Leméac/ Actes Sud 160 pages environ

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