La chronique de Sophie Durocher
L’année dernière, plusieurs âmes sensibles ont déchiré leur chemise à cause des critiques de la tenue vestimentaire de Safia Nolin. Cette année, c’est Safia Nolin elle-même qui a déchiré sa chemise.
Lors du tapis rouge, elle s’est pointée vêtue d’une chemise de bûcheron… déchirée au coude. Il fallait qu’elle montre à nouveau à quel point elle se moque des conventions, à quel point elle est « authentique ».
Misère, on a compris qu’elle ne veut pas se soumettre aux diktats de la mode. Mais avait-elle besoin de s’accoutrer comme un personnage de la comédie musicale Les Misérables ?
Était-ce nécessaire que l’animatrice Claudine Prévost du tapis rouge s’extasie en lui lançant qu’elle était « vraiment magnifique »? Voyons, Claudine, trop c’est comme pas assez. Tu dis à une chanteuse qui porte une robe du soir scintillante qu’elle est magnifique et tu dis à Safia Nolin aux cheveux gras et aux vêtements en loques qu’elle est aussi magnifique ?
Dieu que ce milieu-là est phoney, parfois. Jamais dans la « vraie vie » ils ne seraient aussi complaisants avec quelqu’un d’aussi mal fagoté pour une soirée importante.
J’adore Safia Nolin comme chanteuse : j’ai été renversée et charmée par sa version déchirante du Blues du Businessman au spectacle hommage du Cirque du soleil à Trois-Rivières.
Simplement, je répète ce que je disais l’année dernière : un gala n’est pas une vente de garage, ni pour les gars ni pour les filles.
T’AS SUCK UN D AU COMPLET
La soirée a commencé avec une performance du groupe de hip-hop Alaclair Ensemble. Ils ont remporté le Félix du meilleur album hip-hop. Vous connaissez les paroles de leur chanson Ça que c’tait ? « Tu m’diss dans ton track / Mais c’est subliminal, faque t’es yinque un minable / C’comme better du cash sur le gars qui fait des push-up / […] Reste mince, ferme ta yeule tailleuse pis parle pu jamais d’mon bread / Vis ta vie de blogue de mode, cesse ton rap de gonzesse / T’as suck un D au complet quand t’as dit qu’t’as faite un bon bread. »
C’est notre poète national Félix Leclerc qui aurait été fier qu’un prix portant son nom soit remis à un groupe qui a un tel amour de la langue française et un tel respect pour la femme.
PARITÉ HOMMES-FEMMES
On nous a rappelé deux fois plutôt qu’une hier que Klô Pelgag était la première femme depuis 1993 à remporter le Félix d’auteur-compositeur. Ouain, pis ?
Est-ce un scandale si pendant plusieurs années ce sont des hommes qui se sont illustrés dans cette catégorie? Vous trouvez vraiment que Daniel Bélanger, qui a produit un bijou d’album avec Paloma, ne méritait pas de gagner hier, juste parce que ça prenait un « rééquilibrage » des genres? Dieu que cette fausse controverse m’ennuie à mourir. Après la victoire de Klô Pelgag, Rebecca Makonnen a écrit en majuscules sur Twitter : « WHO RUN THE WORLD ? GIRLS ». N’est-ce pas terriblement sexiste ?
Imaginez l’inverse dans la bouche d’un homme : « QUI MÈNE LE MONDE ? LES GARS ». Il se serait fait lyncher.
AU REVOIR LENNIE
En terminant, un immense merci pour ce superbe hommage à mon adoré, vénéré, regretté Leonard Cohen. Vous m’avez fait pleurer