Une politisation à géométrie variable de la terreur
Aux États-Unis, octobre s’est ouvert sur un acte de terreur à Las Vegas et s’est conclu par un autre acte de terreur à New York. La différence entre les réactions du président Trump à ces deux événements en dit long.
Avant même que les enquêteurs aient pu ratisser la scène de l’attentat de mardi et esquisser un portrait sommaire du suspect, à la Maison-Blanche, on avait déjà sauté aux conclusions.
Comme à Nice, Berlin et Barcelone, un camion a été utilisé pour faucher des piétons et des cyclistes, tuant huit personnes et en blessant douze. C’est l’attentat le plus meurtrier dans la métropole américaine depuis le 11 septembre 2001.
DEUX VISAGES DE LA TERREUR
Le suspect d’origine ouzbèke, qui n’avait jamais éveillé les soupçons des policiers depuis son admission légale en 2010, aurait proclamé son adhésion à Daech et suivi les instructions émises par l’organisation aux aspirants terroristes.
Ce genre de geste extraordinairement difficile à détecter et à prévenir représente le nouveau visage du terrorisme islamiste et pose un défi énorme partout en Occident.
Aux États-Unis, toutefois, les actes de terreur motivés par l’idéologie, la haine ou la démence ont fait plus de victimes depuis 2001 que l’islamisme.
Après Charlottesville et Las Vegas, il y aurait aussi eu urgence d’agir. Et pourtant…
Immédiatement après l’attentat de New York, le président a exigé un durcissement des critères d’admission des immigrants, un filtrage encore plus « extrême » aux frontières et une administration plus expéditive et arbitraire de la justice.
Évidemment, ces paroles n’auront pas de portée réelle tant que ces directives — dont certaines pourraient être inconstitutionnelles — ne feront pas l’objet de règlements concrets. Qu’importe : il faut agir vite.
Ainsi, dès qu’on a su que le suspect avait bénéficié d’une « loterie » qui admet annuellement environ 50 000 immigrants sur une dizaine de millions de requérants, la Maison-Blanche a condamné ce programme en déclarant faussement que les candidats choisis ne sont pas soumis à un examen d’antécédents.
En fait, parmi les centaines de milliers de bénéficiaires admis de ce programme, il serait le premier à être impliqué dans un acte terroriste.
UN CONTRASTE ÉVIDENT
L’empressement du président à exiger le resserrement des programmes d’immigration à la suite de cette tragédie présente un contraste évident avec ses réactions à l’attentat de Las Vegas, où un maniaque des armes à feu a tué 58 personnes et en a blessé plus de 500.
Après la pire fusillade de l’histoire des États-Unis, Trump insistait pour qu’il ne faille surtout pas parler de contrôle des armes à feu. Un mois plus tard, rien n’a changé.
Pourtant, quelques heures à peine après le drame de New York, le président multipliait les demandes d’actions, en pesant sur tous les boutons d’activation de sa base partisane.
Bref, quand un drame confirme les préjugés de Trump et de ses partisans, il y a urgence d’agir. Sinon, les prières suffisent.
Après Charlottesville et Las Vegas, il y aurait aussi eu urgence d’agir.