Le Journal de Montreal

Houdini, Trudeau et Scheer

- c mario.dumont @quebecorme­dia.com L @mariodumon­t

La taxation des biens et services étrangers transigés par commerce électroniq­ue est devenue un cauchemar à Ottawa. Qu’il s’agisse du dossier Netflix ou des demandes de commerçant­s comme Peter Simons, libéraux et conservate­urs sont enchaînés dans des positions qui tiennent de moins en moins la route. Amenez vite Houdini pour les dépêtrer.

Remontons à l’origine du blocage. Lors de la dernière campagne électorale, les conservate­urs ont lancé une offensive « No Netflix tax ». Une publicité montrait Stephen Harper affirmant aimer les séries sur Netflix et promettant de ne pas imposer une supposée « taxe Netflix ».

En réaction et surtout à l’approche d’un débat, Justin Trudeau, qui voulait éviter de se faire accoler l’étiquette du gars qui aime les taxes, a juré qu’il s’opposait lui aussi à l’idée. Aujourd’hui, il ne veut pas reculer sur cette promesse. Trudeau et les conservate­urs demeurent sur leurs positions.

TAXER MOINS VS TAXER MAL

Pourtant, tout cela est d’un absurde total. Que les partis veuillent moins de taxe, cela est bien. Je vote pour des gens qui proposent moins de taxe. Mais l’idée d’une nouvelle taxe appelée taxe Netflix est une invention de marketing politique. Il n’est pas question de nouvelle taxe, ni sur Netflix ni sur les autres biens et services étrangers transigés de la même manière. Il s’agit d’appliquer les taxes de vente existantes.

Or, aucune logique d’équité fiscale ne supporte l’idée de taxer Illico et pas Netflix. Pas plus que de taxer un chandail acheté en ligne d’un commerçant québécois, mais pas celui qu’on fait venir du Vermont. Taxer moins constitue une politique louable qu’un parti politique peut défendre. Mais taxer mal est une erreur !

Lorsqu’il n’était question que de Netflix en 2015, le coup politique des conservate­urs fut assez réussi. Ils ont consolidé l’image du parti qui souhaite moins de taxes. Sauf qu’au moment où a lieu un débat beaucoup plus large et beaucoup plus fondamenta­l pour l’avenir du commerce et de la fiscalité dans notre pays, leur position est adolescent­e. Et sur cette question, le gouverneme­nt libéral s’est collé sur eux par peur de perdre des votes.

DEMANDEZ À MÉLANIE JOLY

La réception horrible qu’a reçue l’entente de Mélanie Joly avec Netflix nous indique que la population a dépassé le premier niveau, qu’elle prend conscience des enjeux. Évidemment, il s’agissait d’une question culturelle, plus sensible au Québec, la réaction a été plus forte ici. Mais à terme, je suis convaincu que tout le Canada va réclamer une action sérieuse sur le sujet.

La situation va empirer puisque le commerce en ligne gagne rapidement des parts de marché. Ici et ailleurs. Un jour, le Canada va se retrouver dans un grand forum internatio­nal sur le problème complexe de la taxation des transactio­ns en ligne. La position du Canada ne peut pas se résumer à une publicité électorale grotesque de 2015. Dans quelques semaines, Québec taxera et enverra à Ottawa sa part de TPS… Ils auront l’air fou.

Messieurs Trudeau et Scheer sont enchaînés ensemble. Qu’ils s’en sortent en même temps.

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MARIO DUMONT Blogueur au Journal Économiste, animateur et chroniqueu­r
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Sur la taxation de services comme Netflix, libéraux et conservate­urs sont embourbés. (Photo : Andrew Sheer et Justin Trudeau)

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