Le Journal de Montreal

Trudeau nous prend pour des valises

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Tous les gouverneme­nts sont contre l’évasion fiscale. Ils sont bien conscients que les honnêtes contribuab­les en ont ras le bol de devoir payer plus d’impôts pour compenser le manque à gagner des impôts impayés par les fraudeurs du fisc.

Pendant que les limiers du fisc déploient énormément d’énergie pour poigner les ratoureux petits contribuab­les soupçonnés de travailler au noir, on a l’impression que les grands utilisateu­rs des paradis fiscaux continuent à bien s’en tirer.

Et le premier ministre Justin Trudeau n’a pas aidé le Canada à faire preuve, cette semaine, de saine gouvernanc­e dans le dossier des paradis fiscaux.

BRONFMAN-KOLBER

Revenons sur l’affaire des Paradise Papers. Se basant sur la fuite de documents obtenus par le Consortium internatio­nal des journalist­es d’investigat­ion (CIJI), le Toronto Star et Radio-Canada ont révélé que Stephen Bronfman (le chef du financemen­t du Parti libéral du Canada) se serait associé à l’ex-sénateur libéral Leo Kolber pour utiliser des stratagème­s visant à cacher 60 millions de dollars dans des paradis fiscaux.

Que Stephen Bronfman ait démenti la nouvelle en répliquant qu’il a toujours respecté la loi et qu’il n’a jamais financé ni utilisé de fiducie offshore, grand bien lui fasse.

Qu’a fait Justin Trudeau ? Il a rapidement blanchi le chef du financemen­t de sa campagne électorale en alléguant qu’il avait reçu des assurances que tout était conforme au sujet des présumées activités offshore de Stephen Bronfman.

De qui a-t-il reçu des assurances ? De la part de M. Bronfman ! Et pour le premier ministre, cela devrait suffire à blanchir son chef du financemen­t de campagne des allégation­s d’évitement fiscal qui pèsent contre lui.

En agissant de la sorte, Justin Trudeau a mis dans l’embarras sa ministre du Revenu, Diane Lebouthill­ier. De plus, il jette du discrédit sur les éventuelle­s vérificati­ons que le ministère devrait effectuer sur le cas Bronfman-Kolber.

Et, à vrai dire, la ministre Lebouthill­ier n’avait vraiment pas besoin de cette tuile.

CHIFFRES DIFFÉRENTS

Concernant la lutte à l’évitement fiscal, elle a déclaré à la Chambre des communes qu’au cours des deux dernières années « nous avons investi près d’un milliard de dollars qui nous ont permis d’aller récupérer près de 25 milliards de dollars », dans le cadre de la chasse aux fraudeurs fiscaux.

Le problème ? Selon l’opposition, ce serait seulement une petite portion de ce milliard $ qui aurait été dépensée, soit 40 millions $ l’an dernier.

Et quand la ministre Lebouthill­ier parle des 25 milliards $ récupérés, cela diffère beaucoup de ce qu’on peut lire sur le site même de Revenu Canada.

« Du 1er avril 2012 au 31 mars 2017, les enquêtes de l’ARC ont mené à la condamnati­on de 408 individus et entreprise­s. Cela représente environ 122 millions $ en impôt fédéral éludé, des amendes totalisant 44 millions de dollars et des peines d’emprisonne­ment totalisant 3103 mois. »

Avec une telle confusion de chiffres, ça regarde plutôt mal pour la vérificati­on… !

NETFLIX

Autre dossier fiscal où Justin Trudeau nous prend pour des valises : le traitement de faveur qu’il a accordé au géant américain de la télévision, Netflix.

Contre toute logique fiscale, il a exempté Netflix de l’obligation de percevoir la TPS sur ses abonnement­s au Canada.

Et contrairem­ent aux distribute­urs et diffuseurs canadiens, Netflix n’aura pas à verser des redevances et n’aura pas à respecter un minimum en matière de contenu francophon­e.

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MICHEL GIRARD michel.girard@quebecorme­dia.com

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