Les vétérans canadiens souffrent de plus en plus
OTTAWA | Douleurs chroniques toujours plus présentes, détresse psychologie grave et adaptation encore plus ardue à la vie civile : les vétérans canadiens vont de mal en pis, selon un sondage d’Anciens Combattants. Plus de 40 % des vétérans disent souffrir de douleur et maux chroniques, tandis qu’un sur cinq croit que sa santé mentale est « passable ou mauvaise » et quasiment le même nombre (18,3 %) présente les symptômes d’un trouble de stress post-traumatique.
PORTRAIT SOMBRE
Ces données sont tirées du plus récent Sondage sur la vie après le service militaire 2016, réalisé tous les trois ans depuis 2010 auprès des vétérans canadiens par le gouvernement fédéral, et dont Le Journal a obtenu copie. L’évolution des données au fil des sondages dresse un portrait sombre de l’état de nos vétérans. On remarque notamment que les vétérans ont de plus en plus de problèmes de santé, vivent plus difficilement leur transition à la vie civile et ont de plus en plus de difficulté à intégrer le marché du travail (voir ci-haut).
BESOINS CRIANTS
Plutôt que de faciliter la vie des 4000 nouveaux vétérans chaque année, le ministère fédéral des Anciens Combattants leur rend la vie encore plus difficile en créant un véritable « dédale bureaucratique », selon de nombreux vétérans, militants et experts consultés.
Au total, on dénombre environ 658 000 vétérans au pays, dont 121 300 au Québec.
« Lorsqu’on parle de prendre soin de nos vétérans qui sont blessés, les programmes et services en place sont loin des quantités et du niveau de maturité nécessaires pour rencontrer l’ampleur du besoin, dénonce Roméo Dallaire, ex-sénateur et lieutenant-général. Pour chaque dollar qu’on investit en équipement, on investit 30 ¢ sur l’humain ».
Selon plusieurs experts, la situation n’est pas près de s’améliorer puisqu’un nombre croissant de militaires qui se sont battus en Afghanistan vont quitter les Forces armées canadiennes au cours des prochaines années.
PAS PRÊT
Le Canada n’était pas prêt à accueillir et à assister ces militaires souvent blessés ou marqués à vie par le combat.
« Les Forces armées ont vu venir cette vague de nouveaux vétérans. On savait que la mission en Afghanistan aurait un impact sur la santé et le bien-être des militaires qui y seraient déployés. Mais on n’avait même pas un responsable de la réhabilitation au début du conflit en 2006 », illustre le lieutenant-général retraité Walter Semianiw, qui a été chef du personnel militaire de 2006 à 2010.
« C’est un cycle qui se répète depuis les années 1950, déplore le général Dallaire. On investit massivement durant les années de guerre, et dès que le Canada se retire du conflit, on coupe les fonds comme si la guerre était terminée et on oublie les humains. C’est toujours la même chose et on n’apprend jamais de nos erreurs ».