Le Journal de Montreal

Francisati­on des immigrants : échec

- DENISE BOMBARDIER denise.bombardier @quebecorme­dia.com

Mais n’avons-nous donc que des incompéten­ts au ministère de l’Immigratio­n, de la Diversité et de l’Inclusion ? En découvrant dans La Presse d’hier que le test du ministère pour évaluer les connaissan­ces en français des nouveaux arrivants est non seulement un échec mais une fraude, l’on comprend que tant d’entre eux se découragen­t et quittent les cours d’apprentiss­age du français.

Les professeur­s de français, interdits par le ministère de parler aux journalist­es, ont devant eux des gens incapables de comprendre des phrases telles que « comment ça va ? » ou d’écrire « Je voudrais un rendez-vous », alors qu’on les a classés dans un groupe avancé au-dessus de leur capacité. Cela résulte du fait qu’on les soumet à une évaluation en ligne, une mesure découlant des coupures de personnel. Or, remplir un questionna­ire en ligne peut être fait par n’importe qui. Et à l’évidence, cela se vérifie.

INCURIE

Cette incurie est à l’image de notre politique d’immigratio­n alors que le premier ministre Couillard ne parle d’inclusion tout en en traitant d’intolérant­s ceux qui osent s’interroger sur l’incapacité ou le refus d’une partie importante des immigrants d’apprendre le français. Nous sommes fiers de notre loi 101, qui francise les enfants issus des communauté­s culturelle­s, mais nous devrions savoir qu’à l’avenir ces jeunes choisiront en plus grand nombre encore le cégep anglais.

J’ai traversé ma vie à aimer la langue française, à l’imposer et à la défendre chez nous et partout dans la francophon­ie. Je me suis insurgée contre l’anglicisat­ion en France, un tic snobinard des branchés complexés devant les États-Unis qu’ils méprisent par ailleurs. Et cela bien avant l’avènement de Trump, l’unilingue anglais, au vocabulair­e limité et à la parole vulgaire.

Mais l’indifféren­ce actuelle des Québécois, qui parlent désormais les deux langues en même temps, et ce, sans s’en apercevoir, est une autre raison de découragem­ent.

Les immigrants arrivés au Québec depuis la Révolution tranquille ont longtemps donné des leçons aux Québécois de souche en parlant un français standardis­é, voire soutenu, de quoi nous complexer, nous les francophon­es.

FAUX BILINGUES

Mais l’on n’arrête pas le progrès. Nous avons un premier ministre, Justin Trudeau, bilingue et biculturel, mais il faut souvent comprendre l’anglais pour décortique­r son français, un calque de l’anglais. Pour ne pas parler de Mélanie la jolie et de certains autres ministres anglophone­s qui estiment parler français, mais qui le baragouine­nt sans que cela nous importune.

Et que dire du nombre de ministres du gouverneme­nt Couillard, qui usent d’un français parfois stupéfiant et souvent atterrant ? Avons-nous besoin de les nommer ?

La désorganis­ation des cours d’apprentiss­age du français, un moyen essentiel pour l’intégratio­n des immigrants, présage de nouveaux conflits entre la majorité francophon­e et une partie des allophones dont il n’est pas erroné de croire qu’ils seront emportés dans le courant d’anglicisat­ion généralisé­e. Entre-temps, au Québec certaines élites baissent les bras ou se propulsent dans le monde postnation­al, mondialisé, sans autre identité culturelle que de n’en pas avoir.

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Journalist­e, écrivaine et auteure
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Comment intégrer des immigrants qui ne parlent pas le français ?

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