Le Journal de Montreal

QUATRE QUESTIONS À FRANÇOIS DUMONTIER

- – Propos recueillis par Louis Butcher

AUSTIN, Texas | Au cours de la longue entrevue qu’il nous a accordée à Austin, à l’occasion du Grand Prix des États-Unis, il y a quelques semaines, François Dumontier a accepté de répondre à nos questions sur des sujets d’actualité en F1.

L’influence des nouveaux propriétai­res, Liberty Media, sera-t-elle bénéfique pour la F1 ?

Ses dirigeants ont de bonnes idées pour relancer le spectacle, autant sur la piste qu’à l’extérieur. Moi, j’embarque à 100 %. Ils veulent notamment que les Grands Prix deviennent des happenings, à l’image du Super Bowl, avec des activités pendant toute la semaine avant d’en arriver au point culminant, la course du dimanche. Certaines démarches ne font pas l’unanimité, comme ces cérémonies d’avant-course « à la NASCAR » qui ont marqué le GP des États-Unis à Austin. Chaque pays est un marché différent. On pourrait faire la même chose à Montréal, mais probableme­nt pas à Silverston­e, par exemple. Liberty Media comprend cette situation. Quand on a lancé à Austin les trois mots célèbres : « Start your engine », une pratique jamais préconisée en F1, c’est venu me chercher.

L’ère Bernie Ecclestone achève-telle ?

Je pense que oui, bien que l’ancien patron de la F1 ait beaucoup fait pour la discipline. Il a su créer un empire. Mais les temps changent et il faut s’ajuster aux nouvelles réalités. Ecclestone avait instauré un modèle d’affaires strictemen­t axé sur la télé. C’était son cheval de bataille. Aujourd’hui, c’est différent. Mes deux garçons, de 16 et 19 ans, sont accros à leur téléphone intelligen­t. Pour attirer une nouvelle clientèle, plus jeune, Liberty Media n’aura d’autre choix que de s’adapter à ce nouveau contexte. D’ailleurs, on veut diffuser les Grands Prix sur les téléphones et les tablettes. Je suis d’accord. Pour conquérir des amateurs plus jeunes, Liberty Media doit aller les chercher dans leur environnem­ent et dans ce qu’ils utilisent comme média.

Que penser d’un calendrier de 25 courses dans quelques années, quitte à sacrifier la journée du vendredi ?

Le calendrier est déjà assez éreintant [il passera de 20 à 21 courses l’an prochain], les équipes devront avoir leur mot à dire. Si on a imposé une pause pendant le mois d’août, c’était pour permettre aux membres des écuries, aux mécanicien­s particuliè­rement, de récupérer. À 25 épreuves par année [une situation en- visagée en 2021], je trouve que c’est beaucoup trop. Si on souhaite couper la journée du vendredi pour y parvenir, je serai le premier à m’y opposer. Montréal est l’un des rares endroits [avec Melbourne ou Spa-Francorcha­mps] où nos tribunes sont très occupées le vendredi. Cette tradition doit demeurer. Si on change cette formule, je devrai modifier le tarif des billets, ce que je ne souhaite pas.

Lance Stroll pourrait-il être un jour aussi populaire que les Villeneuve ?

C’est délicat de répondre à cette question. Lance arrive dans une époque différente de celles de Gilles et Jacques Villeneuve. Il a un nom anglophone. Beaucoup de gens ignoraient, quand il est arrivé en F1, qu’il est né à Montréal. Cette gestion des attentes est douteuse. Lance a accédé à la F1 à 18 ans, Jacques en avait 24. Le fils de Gilles a gagné dès sa première année [1996] en comptant sur la meilleure voiture du plateau et, l’année suivante, il a été sacré champion du monde. Quand tu regardes sa carrière, la suite ne s’est pas bien passée. Peut-être que le parcours de Lance empruntera le chemin inverse. Je suis convaincu qu’il va réussir sa carrière. J’oserais même prédire, à long terme, qu’il a le potentiel pour être champion un jour.

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