Le Journal de Montreal

Des paradis fiscaux « bénis » par Québec

- GIRARD michel.girard@quebecorme­dia.com MICHEL

En permettant à la Caisse de dépôt et placement du Québec de continuer à investir massivemen­t dans les paradis fiscaux, le gouverneme­nt Couillard se tire dans le pied et discrédite la lutte qu’il mène aux utilisateu­rs des paradis fiscaux.

C’est d’autant inacceptab­le que le ministère des Finances, dans son mémoire de septembre 2015 sur le phénomène du recours aux paradis fiscaux, avait lui-même dénoncé avec vigueur les stratagème­s d’évitement fiscal utilisés dans ces juridictio­ns fiscalemen­t avantageus­es et qui lui font perdre annuelleme­nt des centaines de millions de dollars de revenus d’impôt.

LA DÉNONCIATI­ON

Dans sa lettre de présentati­on du mémoire sur le phénomène du recours aux paradis fiscaux, le sous-ministre des Finances, Luc Monty, affirme ceci :

1- « Les paradis fiscaux sont au centre d’un certain nombre de manoeuvres d’évitement fiscal touchant directemen­t les revenus de l’État québécois. Ils servent également d’abri pour des revenus que des contribuab­les ont dissimulés pour ne pas acquitter l’impôt dû au Québec. »

2- « Les paradis fiscaux constituen­t en fait un rouage essentiel de différents stratagème­s conduisant à des pertes fiscales pour l’État. Leur existence fragilise ainsi directemen­t le financemen­t des services publics et réduit l’assiette des revenus du gouverneme­nt. »

Et plus loin dans le mémoire remis à la Commission des finances publiques, le ministère des Finances affirme que « les paradis fiscaux sont des juridictio­ns qui, en raison de leur législatio­n ou de leurs règles de fonctionne­ment, permettent la réalisatio­n de stratégies d’évitement fiscal ou assurent la protection des revenus issus de l’évasion fiscale », écrit-il.

QUE FAIT LEITAO ?

Dans le brûlant dossier des paradis fiscaux, l’argentier du gouverneme­nt Couillard, le ministre Carlos Leitao, lui, joue carrément double jeu. D’une part, il a lancé sa troupe de limiers du fisc à l’assaut des riches particulie­rs et des sociétés qui utilisent les paradis fiscaux pour payer le moins possible d’impôt sur leurs revenus. Ce qui est totalement justifié.

Mais d’autre part, il donne sa bénédictio­n à la Caisse qui utilise à fond de train les paradis fiscaux pour rentabilis­er davantage son portefeuil­le en bénéfician­t des avantages fiscaux offerts par les mêmes paradis fiscaux.

Rappelons que la Caisse y détient 26 milliards de dollars d’actifs, répartis dans neuf paradis fiscaux. De concert avec des partenaire­s financiers, la Caisse possède ellemême six fonds enregistré­s à son nom aux Îles Caïmans et deux au Luxembourg. De plus, elle détient des placements dans 346 fonds et sociétés implantés dans ces pays à la fiscalité légère.

INDÉFENDAB­LE

À la lumière du mémoire de son ministère sur l’impact hautement négatif des paradis fiscaux sur les finances publiques, comment le ministre Leitao peut-il continuer de défendre et justifier la présence de la Caisse dans les paradis fiscaux ?

C’est fiscalemen­t indéfendab­le de la part d’un ministre des Finances. Et sa position mine la crédibilit­é du plan d’action qu’il a dévoilé la semaine dernière pour lutter contre l’évasion fiscale et l’évitement fiscal par l’entremise des paradis fiscaux.

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