Forcés de rembourser 229 000 $
La succession d’un homme d’affaires devra payer pour une « passe » avec Transports Québec
La famille d’un homme d’affaires de la Mauricie qui avait fait la passe avec Transports Québec lors de l’expropriation de son terrain vient d’être condamnée à remettre 229 100 $ au gouvernement, 17 ans après les faits.
Le dossier a traîné si longtemps devant la justice que François Chagnon a eu le temps de mourir. C’est donc sa succession qui devra payer selon un jugement rendu le 20 septembre dernier.
Tout avait débuté à la suite d’une enquête du Journal publiée en janvier 2003. Ce reportage a mené au déclenchement d’une enquête criminelle et des accusations ont été portées quelques années plus tard.
Selon le jugement rendu en septembre dans une poursuite civile, l’homme d’affaires avait comploté avec un évaluateur du ministère des Transports pour faire gonfler la valeur de son terrain où devait passer la route 155 entre Grand-Mère et La Tuque. Il avait touché la coquette somme de 285 000 $ pour un terrain évalué par la municipalité à 28 000 $.
DES CHEVAUX PAYANTS
François Chagnon a notamment profité d’une indemnité de 191 414 $ pour une écurie comptant 11 chevaux.
Selon l’évaluation de Pierre Baillargeon du ministère des Transports, la construction de la route aurait empêché les chevaux d’avoir suffisamment d’herbe à brouter.
Or, un autre évaluateur a indiqué que le terrain ne produisait aucun fourrage et qu’aucune indemnisation n’était nécessaire. De plus, il a été déterminé que les chevaux, les machineries et équipements de ferme avaient été vendus quelques mois avant l’expropriation pour 35 000 $.
L’histoire la plus abracadabrante est toutefois celle d’un bâtiment qui se trouvait en plein sur le tracé de la route 155. Quelques années plus tôt, en 1996, l’entreprise de François Chagnon avait obtenu un contrat de 9980 $ du ministère des Transports pour démolir le restaurant La Traversée qui se trouvait ailleurs sur le tracé de la route 155.
Or, plutôt que de le démolir en entier, il en a conservé une partie qu’il a déménagée sur le terrain de Grande-Anse.
RESTO PAYÉ DEUX FOIS
Il a donc revendu ce bâtiment au MTQ lors de l’expropriation en 2000. À ce moment, il n’était relié à aucun service sanitaire, raccordement électrique ou puits artésien.
Pire encore, un faux puits artésien avait été mis en place avec un cou- vercle au sol qui était relié à une brique par une corde.
L’enquête a également permis de déterminer qu’il n’avait jamais payé 10 000 $ pour des toiles utilisées pour faire de la pisciculture dans deux lacs à truite. Il s’avère que les deux bassins n’étaient que des trous asséchés creusés deux ans avant l’expropriation.
PRISON
L’évaluateur Pierre Baillargeon a été congédié du ministère des Transports quelques mois après les révélations du Journal avant d’être condamné à six mois de prison en 2008. François Chagnon pour sa part a été condamné à neuf mois à purger dans la collectivité compte tenu de son état de santé fragile. Il était alors âgé de 81 ans.
Sa succession n’a pas assisté au procès civil qui s’est déroulé à Shawinigan.