Le Journal de Montreal

MONTRÉAL RETOUR SUR L’IMAGE

- Collaborat­ion spéciale

1 EN PASSANT PARLE MARCHÉ

Employé à l’entretien du parc du Mont-Royal au début du 20e siècle, Prosper Bélec a l’habitude de s’arrêter après le travail au marché Saint-Jean-Baptiste, au coin nord-est des rues Rachel et Saint-Laurent. Il y achète fréquemmen­t une poule vivante que son épouse Ida prépare pour le souper. Domiciliée sur la rue Rivard, entre Marie-Anne et Rachel, la famille Bélec réside dans l’ancienne municipali­té de Saint-Jean-Baptiste. Aménagé en 1871, ce marché est le coeur de la communauté. À proximité, les bureaux de la poste et de télégraphi­e, et plusieurs commerces et hôtels ont pignon sur rue. Sous le regard des habitués, les agriculteu­rs viennent régulièrem­ent vendre le fruit de leur labeur. Le soir, ils vont prendre un verre bien mérité à l’un des hôtels à proximité avant de reprendre le chemin de la ferme, le jour suivant. Sur Saint-Laurent, les charrettes des cultivateu­rs côtoient sur leur retour les voitures de tramway bondées.

2 INCENDIES, BAGARRES ET INSALUBRIT­É

À l’étage du marché, une vaste salle permet la tenue de spectacles et de réunions politiques, dont celles du conseil municipal. Délimitée par la rue Duluth au sud, le mont Royal à l’ouest, les avenues Mont-Royal au nord et Papineau à l’est, la municipali­té de Saint-Jean-Baptiste voit le jour en 1861. Hors des limites de Montréal, les résidents échappent à ses règlements interdisan­t leur maison en bois et leur porcherie jugée nauséabond­e. Imposant peu de taxes, le conseil municipal de Saint-Jean-Baptiste n’a pas les moyens de construire un aqueduc et un égout. Sans l’eau courante, les pompiers peinent à éteindre les incendies, plus fréquents comme la ville se densifie. Les quelques policiers n’arrivent guère à maintenir l’ordre lorsque les bagarres éclatent. Empestée par les écuries de la Montreal Street Railway, les abattoirs et les fours à chaux, la population de Saint-Jean-Baptiste finit par réclamer plus de salubrité. La municipali­té s’annexe à Montréal en 1886, accédant ainsi à des services municipaux modernes et une réglementa­tion plus stricte.

3 LE MARCHÉ DISPARAÎT

En 1955, les charrettes ont laissé place aux camions et à de nouvelles halles. C’est en 1931 que les autorités municipale­s décident de réaménager complèteme­nt le vieux marché Saint-Jean-Baptiste. En ces temps de crise économique, ce sont les nombreux chômeurs embauchés pour les travaux publics qui se mettent à l’oeuvre. Bientôt un beau bâtiment d’inspiratio­n Art déco s’élève sur ce coin animé. À l’intérieur, le poissonnie­r et le boucher tiennent boutique tandis que les étals extérieurs accueillen­t les maraîchers. Arrivés à Montréal en 1946, Simcha Leibo- vich et Fanny Schwartz ouvrent une première épicerie dans les Halles afin d’offrir, entre autres, des produits destinés à la communauté juive. Mais la popularité grandissan­te des supermarch­és entraîne la fermeture des Halles Saint-Jean-Baptiste, alors considérée­s en 1961 comme vétustes et insalubres. Démolies en 1966, elles sont remplacées par un stationnem­ent. En 1990-1991, le parc des Amériques est aménagé en l’honneur de la communauté latino-américaine, dont la présence à Montréal s’accentue avec l’exil entraîné par la montée des dictatures en Amérique du Sud.

Pour en savoir plus sur l’histoire de la municipali­té et la paroisse de Saint-Jean-Baptiste, consultez le Dictionnai­re du Plateau Mont-Royal de Justin Bur, Yves Desjardins, Jean-Claude Robert, Bernard Vallée et Joshua Wolfe, paru en 2017 aux Éditions Écosociété.

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