Le fisc aux trousses de deux ex-collecteurs de fonds libéraux
Les collecteurs de fonds Franco Fava et William Bartlett auraient bénéficié d’un stratagème « illégal »
Revenu Québec réclame plus de 200 000 $ à deux ex-argentiers libéraux, car ils n’auraient pas déclaré des remboursements d’assurances considérés « illégaux » par les autorités.
Les ex-collecteurs de fonds William Bartlett et Franco Fava, bien en vue dans la région de Québec, sont visés par des procédures de recouvrement tout comme une vingtaine d’autres riches clients d’un conseiller d’assurance controversé.
Ces deux hommes avaient fait la manchette en 2016 après que Radio-Canada eut révélé leur implication alléguée dans le partage de 2 millions $ lors de transactions de la Société immobilière du Québec (SIQ).
Notre Bureau d’enquête a découvert que messieurs Bartlett et Fava se seraient fait rembourser en toute connaissance de cause, à la fin des années 2000, des polices d’assurance-vie d’une valeur colossale. Au Québec, il est illégal pour un représentant de rembourser une prime d’assurance.
Les remboursements étaient faits chaque mois par le vendeur d’assurances Guillaume Chabot, ancien président de la firme Relève d’entreprise Élan. Chabot a été radié à vie en 2011 par la Chambre de sécurité financière (CSF). Son entreprise a été condamnée à une pénalité de 50 000 $.
7 M$ D’ASSURANCE-VIE
Selon des documents du fisc, Bartlett et Fava « ont trouvé leur compte » dans le stratagème « en bénéficiant d’une énorme couverture tout en recevant suffisamment d’argent de M. Chabot pour défrayer la prime ».
Bartlett conteste l’imposition de 168 000 $ que lui a versés Chabot en 2009. Fava, de son côté, conteste l’imposition de paiements qui se chiffrent à presque 450 000 $ entre 2008 et 2009.
Les polices d’assurance-vie en cause ont une couverture et une prime qui « sont étonnamment élevées », selon le fisc. Par exemple, Franco Fava a pris une police d’assurance-vie d’une couverture de 7 millions $, qui coûtait 40 000 $ par mois.
Selon le fisc, Chabot pouvait quand même faire un profit puisque « les importantes commissions qui lui ont été versées par les différents assureurs, entre 200 % et 300 % du montant des primes annuelles, lui ont permis de couvrir les paiements incitatifs, tout en étant en mesure d’en conserver une large part ».
« Le stratagème consistait [...] à maintenir la police en vigueur suffisamment longtemps pour que l’assureur ne soit plus en droit de recouvrer la commission versée au courtier et à son représentant », avance Revenu Québec. En d’autres termes, c’est l’assureur qui se faisait avoir.
OPINION JURIDIQUE
Bartlett et Fava estiment n’avoir rien à se reprocher. Dans une requête soumise devant la Cour du Québec, ils disent avoir « été avisé[s] par M. Chabot à l’effet qu’une opinion juridique avait été rendue par un fiscaliste éminent, Me [Stéphane] Giroux, oeuvrant pour le cabinet BCF ».
Ce fiscaliste aurait indiqué « de manière catégorique que ces paiements ne seraient pas imposables ».
Franco Fava, William Bartlett et Me Giroux n’ont pas rappelé Le Journal. Guillaume Chabot n’a pu être joint.