Le Journal de Montreal

La banque ferme ses comptes

- HUGO JONCAS

Après près de 15 ans de relation d’affaires avec lui, la Banque Nationale ferme les comptes d’un prête-nom profession­nel de Québec qui doit se défendre d’accusation­s de blanchimen­t d’argent en Espagne.

La Banque a pris cette décision trois jours après les appels de notre Bureau d’enquête sur son client.

Jean-François Saint-Laurent assure pourtant qu’elle était « parfaiteme­nt au courant » de la nature de ses activités depuis 2003 : créer en série des dizaines de sociétés-écrans québécoise­s pour des actionnair­es domiciliés dans des paradis fiscaux.

Installé en Suisse depuis 2008, l’homme d’affaires a notamment créé de nombreuses compagnies liées au bureau d’avocats Mossack Fonseca, au coeur de la fuite massive sur les paradis fiscaux en 2016, les Panama Papers.

Pour ses activités au Québec, Jean-François Saint-Laurent a toujours utilisé des comptes à la Banque Nationale. L’un d’eux a même servi à blanchir plus de 8 millions d’euros (12 millions $ canadiens) provenant d’investisse­urs floués, selon les procureurs espagnols.

PAS DE RÉPONSE

Le 13 novembre, notre Bureau d’enquête a questionné l’institutio­n financière à ce sujet. Elle n’a pas répondu à nos questions, mais trois jours plus tard, elle annonçait à Jean-François Saint-Laurent la fermeture imminente des trois comptes de son entreprise, le Centre d’affaires Forsythe.

« La Banque Nationale encourage à tous les niveaux de l’organisati­on une applicatio­n rigoureuse de la gestion de ses risques, mentionne sa lettre, qu’a obtenue notre Bureau d’enquête. Dans cette optique, les résultats de notre analyse nous amènent à conclure que le profil de vos activités financière­s ne rencontre pas les politiques de la Banque en la matière. »

M. Saint-Laurent assure toutefois que l’institutio­n financière savait très bien en quoi consistaie­nt ses activités.

« Je leur ai “référé” de nombreux clients dans le passé. Encore il y a quelques mois, je leur ai “référé” un gros client russe », dit-il.

Jusqu’ici, aucun média n’avait cependant fait état de ses problèmes espagnols. « C’est comme ça que les banques fonctionne­nt, dès que quelque chose de “public” sort sur quelqu’un, elles le bannissent », dit Jean-François Saint-Laurent.

Qu’à cela ne tienne, l’homme d’affaires assure qu’il trouvera quand même le moyen d’ouvrir d’autres comptes pour ses activités. « Je vais demander à quelqu’un de se mettre administra­teur à ma place. »

 ??  ?? JEAN-FRANÇOIS SAINT-LAURENT Accusé
JEAN-FRANÇOIS SAINT-LAURENT Accusé

Newspapers in French

Newspapers from Canada