MARTIN Réforme fiscale : le festival du lobbying
Donald Trump avait promis de « drainer le marécage » et de débarrasser la capitale américaine des parasites qui infestent les couloirs du pouvoir. C’est le contraire qui s’est produit. En ce jour de Thanksgiving aux États-Unis, les lobbyistes ont de quoi être reconnaissants.
Washington a bien changé depuis ma première visite quand j’étais étudiant. L’essor extraordinaire de la capitale américaine est largement attribuable à la croissance phénoménale de ce qui est devenu la principale industrie privée en ville : le lobbying. Le candidat Trump promettait de débarrasser la ville de ces marchands d’influence qui chargent le gros prix pour infléchir les politiques publiques dans l’intérêt de leurs clients.
Pourtant, un an après l’élection, l’industrie se porte mieux que jamais.
INDUSTRIE PROSPÈRE
Le nouveau quartier général des lobbyistes est le chic Trump International Hotel, commodément situé entre la Maison-Blanche et le Capitole, où personne ne s’offusque que les profits sur la vente des cocktails de 25 $ à 100 $ vont directement au président. Au contraire, c’est une raison de plus pour s’y faire voir ! La vaste majorité des lobbyistes de Washington servent la grande entreprise et ils sont heureux de négocier avec une administration qui partage leur vision du monde. De plus, comme Trump a allègrement sabré les effectifs publics, il y a un déficit d’expertise croissant au gouvernement, que les lobbyistes se font un devoir de combler.
RÉFORME ATTENDUE
Le Code fiscal n’a pas été revampé depuis 1986 et il est effectivement dû pour une réforme.
En fait, certains des engagements du candidat Trump n’étaient pas insensés. Par exemple, l’imposition élevée des entreprises encourage l’évasion fiscale et il y a tellement d’échappatoires qu’un riche qui paie tous ses impôts est assuré d’être la risée de son country club. Les lobbyistes attendaient cette réforme comme les enfants attendent le matin de Noël. Pour eux, c’est l’occasion de faire des affaires en or.
TRAVAIL BIEN FAIT
Même si les économistes estiment que le projet que la Chambre des représentants vient d’envoyer au Sénat a plus de chances d’enrichir les riches en faisant exploser le déficit que de stimuler l’économie, il démontre que les lobbyistes ont fort bien fait leur travail.
En effet, alors que la classe moyenne recevrait de modestes réductions d’impôts qui suffiraient peut-être à l’amadouer, les grandes entreprises et les plus fortunés gagneraient le gros lot. Les lobbyistes ont su convaincre les législateurs d’insérer de petites clauses que très peu d’électeurs remarquent, mais qui apportent de grands bénéfices à leurs clients. Ils ont été tout aussi habiles à les convaincre de ne pas toucher les échappatoires qui faisaient leur affaire. Il reste beaucoup à faire avant l’adoption de la réforme. Avec la majorité précaire des républicains au Sénat et le leadership vacillant du président, son passage est loin d’être garanti. D’ici là, le festival du lobbying bat son plein à Washington et le marécage se porte mieux que jamais.