Le Journal de Montreal

Un ordre profession­nel exigé pour mettre fin aux prête-noms

Les parajurist­es ne veulent plus de cas qui ternissent le bon travail des autres

- JEAN-FRANÇOIS CLOUTIER

Les parajurist­es du Québec réclament la création d’un ordre profession­nel pour éviter des cas comme celui d’Annette Laroche, cette secrétaire de grands cabinets d’avocats qui a servi de prête-nom sans le savoir à des fraudeurs des Panama Papers.

En 2016, notre Bureau d’enquête révélait que Mme Laroche, ex-employée du cabinet montréalai­s De Grandpré Chait, a été administra­trice prête-nom dans au moins 158 entreprise­s incorporée­s au Québec.

Trente de ces compagnies québécoise­s avaient un coadminist­rateur et un actionnair­e dans un paradis fiscal (Panama, Bahamas, Belize, îles Vierges britanniqu­es, îles Seychelles, Suisse, Samoa et Chypre).

Annette Laroche, « une parajurist­e [...] s’est sentie obligée d’être un prête-nom afin de se conformer aux demandes de son employeur, sans trop oser poser de questions faute de perdre son emploi », dénonce l’Associatio­n canadienne des parajurist­es (ACP) section Québec dans un document soumis cet automne à l’Office des profession­s du Québec et obtenu par notre Bureau d’enquête.

Les parajurist­es sont des employés qui oeuvrent en soutien aux avocats. À ce titre, Mme Laroche a tellement signé de documents à la demande de ses patrons, selon elle, que son nom ressurgit aujourd’hui aux quatre coins de la planète.

« Un parajurist­e devrait pouvoir être en mesure de se “protéger” ou de se “prémunir” lorsqu’un juriste ou un profession­nel lui demande de signer des documents pour lui ou en son nom ou, encore, d’effectuer telle opération pour un client », affirme l’ACP.

PROBLÈME D’ÉTHIQUE

« Si ce n’est pas éthique, un parajurist­e pourrait refuser de faire [un acte] à cause de son code déontologi­que. [...] On n’a pas de ligne 1 800 PLAINTE en ce moment, ces actes-là [potentiell­ement non éthiques] ne sont pas divulgués », explique Marc-André De Sève, président de l’ACP.

Selon le porte-parole, l’associatio­n est très mal à l’aise avec le cas de Mme Laroche, même si cette dernière juge personnell­ement n’avoir rien fait d’illégal.

« On n’est pas d’accord avec ce qu’elle a fait. On considère que les actes qu’elle a faits vont à l’encontre de ce qu’un parajurist­e devrait faire. C’est pas n’importe quoi donner son nom comme administra­teur d’une compagnie », a-t-il dit.

Selon l’ACP, la profession de parajurist­e est beaucoup mieux encadrée en Ontario qu’au Québec. Les parajurist­es ontariens ont plus de droits, mais aussi plus de responsabi­lités.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES ?? Annette Laroche a une vie en apparence bien ordinaire, elle qui habite avec son petit chien dans un modeste cottage de Deux-Montagnes. Mais elle a servi de prête-nom à plusieurs individus louches apparaissa­nt dans les Panama Papers.
PHOTO D’ARCHIVES Annette Laroche a une vie en apparence bien ordinaire, elle qui habite avec son petit chien dans un modeste cottage de Deux-Montagnes. Mais elle a servi de prête-nom à plusieurs individus louches apparaissa­nt dans les Panama Papers.

Newspapers in French

Newspapers from Canada