Sexe, drogue et milléniaux
C’est vrai que les jeunes ont plus de relations sexuelles, plus de partenaires différents, consomment plus de pornographie, fument plus de marijuana ou prennent plus de drogues dures que les baby-boomers au même âge. On pense qu’ils sont des dépravés, des bêtes de sexe, des drogués et une génération amorale. Mais c’est tout le contraire.
Déjà sept chroniques que l’on écrit ensemble et c’est la première fois où je me sens inconfortable. Il n’y a pas beaucoup de jeunes qui aiment parler de sexe avec leurs parents.
Je te comprends, et c’est justement parce que c’est un sujet tabou qu’il faut en parler. Il y a beaucoup de parents qui sont inquiets au sujet des habitudes sexuelles de leurs enfants, surtout avec un accès aussi facile à la pornographie sur internet.
Votre génération a connu une libération sexuelle, mais nous, nous vivons une véritable révolution sexuelle. Le sexe est partout sur internet, dans des clips vidéo, dans des publicités suggestives, dans les émissions de téléréalité, etc.
On est loin de la génération du Peace and Love. Comment pouvez-vous avoir une sexualité normale quand internet vous expose à des actes sexuels déviants ou violents ?
Notre défi est de différencier le virtuel et le fantasme de la réalité. Nos repères ne sont pas les mêmes que les vôtres, mais nous avons d’aussi bonnes valeurs morales.
OK, mais vous êtes en contact avec de la sexualité explicite à un très jeune âge sans y être préparés. Ne croyez-vous pas que cela affecte vos pratiques sexuelles ?
On n’a pas une sexualité si différente. On a eu, en moyenne, notre première relation sexuelle complète à 17,3 ans et vous, à 18,8 ans. On a eu, en moyenne, 8,4 partenaires différents et vous, 8,8.
Mais vous n’avez pas encore 35 ans ! Internet ne vous oblige-t-il pas à être plus performants ? Pour rire, on pourrait dire qu’internet met la barre haut.
Le cybersexe a quand même un impact. Par exemple, 15 % des jeunes avouent avoir eu des relations sexuelles inhabituelles ou anormales contre 6 % des gens plus âgés. Nous n’avons pas les mêmes codes de sexualité que vous. On en parle plus librement avec notre partenaire, on explore plus et on
passe à l’acte plus rapidement.
Vous êtes peut-être plus libres, mais vous condamnez plus vite l’infidélité. Il y a deux fois plus de jeunes qui ne pardonneraient pas à leur conjoint(e) s’ils étaient trompés.
C’est paradoxal, car la tentation et le jeu de la séduction sont plus grands, en raison des réseaux sociaux et des applications de rencontres à portée de main. La fidélité est la grande préoccupation des jeunes, car il y a plus d’occasions d’être infidèles.
Avant, on trouvait sa conjointe dans la même ville ou village. Aujourd’hui, avec des applications comme Tinder, cela devient plus facile de changer de partenaire. Vous pouvez même la trouver à l’autre bout du monde.
Ce qui n’empêche pas qu’il y ait plus de milléniaux qui sont satisfaits de leur vie sexuelle (76 %) que de baby-boomers (70 %). C’est peut-être votre génération qui a un problème avec le cybersexe ?
Tu marques peut-être un point. Vous êtes non seulement plus ouverts sur la sexualité, mais aussi sur la drogue. Les deux tiers des jeunes ont déjà pris de la drogue. C’est beaucoup.
Nous avons un rapport différent aux drogues. C’était illégal pour vous et ce sera légal pour nous sous peu. Aussi, certaines actions sont plus immorales pour vous et d’autres pour nous.
Mais le plus rassurant, c’est que cela ne vous empêche pas d’avoir de solides valeurs morales, comme le révèle notre tableau sur la moralité. Elles peuvent être différentes, mais tout aussi réelles. Comme les valeurs des baby-boomers étaient différentes de celles de leurs parents.
On recherche tous la même chose : l’amour et une vie de couple active et harmonieuse. Finalement, les milléniaux ne sont pas si pires que ça !
Jouir au maximum, pour le meilleur et pour le pire, et dans un minimum de temps. Au fond, vous ne faites que ce qu’on vous a montré !