Le Journal de Montreal

La dictature des minorités haineuses

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com

Le reportage du Téléjourna­l de Radio-Canada sur la censure à l’université a probableme­nt choqué ceux qui s’imaginent encore qu’elle valorise la liberté intellectu­elle. Mais ceux qui sont familiers avec elle ne pouvaient pas feindre la surprise.

D’un côté, on trouvait une jeune fille plutôt à droite subissant la censure d’une associatio­n étudiante.

De l’autre, on trouvait la porteparol­e de cette associatio­n, pratiquant fièrement la censure.

CENSURE

Ce qui est dramatique, c’est que cette dernière est assez représenta­tive de la nouvelle génération militante à gauche qui prétend redéfinir le débat public en en excluant ceux qui ne se réclament pas de ses dogmes.

Quelques exemples. On trouve ainsi des militants antiracist­es qui veulent décider qui aura droit ou non à la parole publique. Leur objectif : en priver les racistes. Certains diront : pourquoi pas ?

Sauf qu’on constate que nos antiracist­es ont une définition très large du racisme. Vous critiquez le multicultu­ralisme ou l’immigratio­n massive ? Vous vous demandez dans quelle mesure l’islam parvient à s’intégrer aux sociétés occidental­es ? On pourra à tout moment vous traiter de raciste.

Pire encore : si vous contestez l’idée que le racisme systémique structure notre société, on pourra aussi vous accuser de racisme. Il faut voir le monde comme ces militants endoctriné­s ou se condamner à l’ostracisme médiatico-politique.

Je parle de l’antiracism­e qui devient fou, mais je pourrais aussi évoquer le féminisme radical qui voit du sexisme partout. Ou encore, la mouvance trans, en croisade contre une supposée transphobi­e généralisé­e, et qui balance des injures à ceux qui voient le monde autrement.

Partout, en toutes circonstan­ces, les indignés profession­nels surveillen­t la parole publique, à la recherche de propos à dénoncer. C’est la dictature des minorités haineuses.

Ces censeurs fiers de l’être dénaturent l’université, souvent avec la complicité des autorités universita­ires, trop lâches pour défendre leur institutio­n, et la collaborat­ion de professeur­s-militants qui confondent savoir et idéologie.

Ces censeurs sont tellement ivres de vertu et tellement convaincus d’avoir le monopole de la vérité que la simple expression d’un point de vue différent du leur semble être un scandale.

Ils nous disent : la liberté d’expression ne doit pas servir à exprimer des idées qui pourraient être offensante­s pour telle ou telle minorité. En gros, ils veulent nous imposer leur définition du blasphème identitair­e.

Certains, pour jouer les grands équilibris­tes, nous disent qu’on doit trouver un équilibre entre la liberté d’expression et l’encadremen­t des propos controvers­és.

C’est une fausse sagesse.

Les propos controvers­és des uns sont souvent les propos lumineux des autres

POLITIQUEM­ENT CORRECT

Car qui distinguer­a entre les propos controvers­és et ceux qui ne le sont pas ? Les minorités idéologiqu­es hystérique­s pour qui le désaccord est une offense ? Une autorité surplomban­te composée d’experts biaisés ?

Et les propos controvers­és des uns sont souvent les propos lumineux des autres.

Il faut en revenir au simple bon sens : les université­s doivent prendre les moyens nécessaire­s pour restaurer un climat intellectu­el propice à la liberté intellectu­elle et faire comprendre aux sectes idéologiqu­es que leur règne est terminé.

Mais cela exigera du courage. Car c’est toute la société qui est soumise au politiquem­ent correct.

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