Le Journal de Montreal

Le paradoxe linguistiq­ue

- josee.legault@quebecorme­dia.com @joseelegau­lt

Le fameux « Bonjour-Hi! » n’est qu’un symptôme parmi tant d’autres d’une réalité navrante. Véritable coeur de l’identité québécoise, le français recule à chaque recensemen­t. Or, au-delà des manchettes passagères, qui s’en émeut vraiment ?

Malgré l’inaction crasse de nos gouverneme­nts depuis vingt ans, quelques individus ont néanmoins tenté de sonner l’alerte. Dès 1995-1996, je l’ai fait moimême en codirigean­t le premier bilan détaillé de l’état du français au Québec depuis l’adoption de la loi 101 en 1977.

SILENCE RADIO

Tous les reculs que l’on constate aujourd’hui y étaient déjà annoncés, mais le nouveau premier ministre, Lucien Bouchard, n’en avait cure. Depuis, à de rares exceptions près, c’est silence radio.

Parmi ceux qui ont longuement documenté la situation du français avec rigueur et courage, on trouve aussi le mathématic­ien Charles Castonguay. Un esprit scientifiq­ue brillant.

Lors de son passage en politique, l’ex-député péquiste Pierre Curzi a également beaucoup donné. Sa droiture intellectu­elle sur un sujet aussi complexe commande le respect. Puis vint Éric Bouchard, un jeune chercheur aguerri et minutieux.

QUI LE FERA ?

Aux côtés de Pierre Curzi, M. Bouchard a produit de précieuses études détaillées sur l’état inquiétant du français au Québec. Il vient d’ailleurs tout juste de quitter la direction du Mouvement Québec français. Un grand merci lui est dû pour son travail acharné. Idem pour Mario Beaulieu du Bloc québécois.

Dans le seul État francophon­e d’Amérique, le paradoxe désespéran­t est le suivant : jamais la fragilité du français n’aura été aussi bien documentée sur le plan scientifiq­ue, mais jamais l’indifféren­ce politique et citoyenne face à ce même recul n’aura été aussi grande.

Éric Bouchard a raison. C’est d’une fondation bien nantie pour la défense du français dont nous aurions urgemment besoin. Question de continuer à documenter la réalité dans l’espoir qu’un jour, un gouverneme­nt allume enfin avant qu’il ne soit trop tard. Mais qui le fera ?

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