Le Journal de Montreal

Pas de grossesse pendant leurs études

Des femmes se font dire de ne pas tomber enceintes

- CATHERINE MONTAMBEAU­LT

Une chercheuse québécoise reconnue dénonce que des directeurs de recherche demandent à des étudiantes de ne pas tomber enceintes durant leurs études supérieure­s.

Ève Langelier affirme que certaines étudiantes doivent signer, lors de leur inscriptio­n à la maîtrise ou au doctorat, une entente stipulant qu’elles ne tomberont pas enceintes pendant qu’elles participen­t à un projet de recherche.

« C’est comme demander à une femme, pendant une entrevue d’embauche, si elle veut des enfants. C’est totalement discrimina­toire », souligne la titulaire de la Chaire pour les femmes en sciences et en génie au Québec.

Mme Langelier a publié une lettre ouverte sur Facebook mardi pour critiquer cette pratique. Les hommes seraient aussi visés par cette dernière, puisqu’on exigerait qu’ils ne partent pas en congé de paternité durant leurs études.

Selon la titulaire, ces demandes pourraient s’expliquer par le fait que les professeur­s subissent beaucoup de pression pour compléter leurs recherches rapidement. Lorsque des étudiants participen­t à leurs travaux, ils ne veulent donc pas qu’ils s’absentent trop longtemps.

Elle craint toutefois que ce genre de demande décourage les femmes souhaitant devenir mères de se lancer dans des études supérieure­s.

« Quand tu veux faire une carrière académique en sciences, ce n’est pas facile de trouver le bon moment pour avoir des enfants, dit-elle. Quand tu finis ton doctorat, tu as 29 ou 30 ans et tu veux avoir un emploi, alors ce n’est pas encore le temps. »

À SHERBROOKE

Comme Ève Langelier est professeur­e en génie mécanique à l’Université de Sherbrooke (UdeS), tous les cas qui lui ont été rapportés se sont produits dans cet établissem­ent.

« Mais c’est quelque chose qui n’est pas cautionné par l’UdeS, assure-t-elle. Ce sont des pratiques individuel­les.

« Et si ça arrive ici, ça ne me surprendra­it pas du tout que ça arrive ailleurs aussi », ajoute-t-elle.

Le vice-recteur à la recherche et aux études supérieure­s de l’UdeS, Jean-Pierre Perreault, confirme que l’Université « n’encourage aucunement de telles pratiques, qui sont d’ailleurs contraires à la Charte des droits et libertés ».

« L’UdeS s’engage à prendre les moyens raisonnabl­es pour prévenir la discrimina­tion et l’inégalité, les faire cesser et les sanctionne­r », a-t-il indiqué par courriel.

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