Un parasite tropical dans le sang
Une maladie du Sud potentiellement mortelle circule en douce dans les veines de milliers de Canadiens
Des milliers de Canadiens pourraient être affectés par un parasite d’Amérique latine potentiellement mortel à cause d’une transfusion sanguine ou parce qu’ils sont nés d’une mère infectée, préviennent des scientifiques.
Nous sommes face à « un réel problème de santé publique », prévient Momar Ndao, directeur du Centre national de référence en parasitologie, à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill.
En collaboration avec une équipe de spécialistes en médecine tropicale et en médecine de laboratoire de Winnipeg et de Montréal, le Dr Ndao vient de publier une analyse sur la maladie de Chagas, dans la revue médicale The Canadian Medical Association Journal.
Cette maladie méconnue, un mal parasitaire responsable de 50 000 morts par an en Amérique latine, circule au Canada.
« Les individus potentiellement infectés mais non diagnostiqués se comptent par milliers », indiquent-ils.
Le parasite se transmet par la morsure du trianome, une variété de punaise qui se nourrit de sang. Bien que cet insecte tropical ne survive pas ici, le parasite est présent, car il se transmet aussi de la mère à l’enfant par le placenta et par le sang.
Pour la première fois au Canada, l’équipe de Momar Ndao a documenté trois cas de maladie de Chagas au sein d’une même famille, un homme et deux femmes nées à Winnipeg d’une mère paraguayenne porteuse du parasite.
SANG CONTAMINÉ
Aucun ne se savait contaminé, si bien que l’un d’eux a donné du sang régulièrement pendant des années. Il n’a été exclu qu’en 2010.
La Société canadienne du sang distribue du sang partout au pays, sauf au Québec, où Héma-Québec prend le relais. Ce n’est qu’entre 2009 et 2010 que les deux organisations ont enrichi leur questionnaire d’identité des donneurs.
« Si j’avais reçu une transfusion sanguine avant 2010, je demanderais à être testé pour la maladie de Chagas », dit le Dr Ndao.
Toutes les personnes dont la mère est née dans un pays endémique devraient également se faire tester, ajoute son collègue le Dr Pierre Plourde, directeur médical de la clinique santé-voyage de l’Office régional de la santé de Winnipeg.
Pierre Plourde indique que le questionnaire mis en place par les banques de sang est efficace pour capter les personnes à risque. Il s’inquiète toutefois des donneurs d’organes qui ne sont pas, eux, testés pour la maladie de Chagas.